151 Note d'information d'Oxfam 22 septembre 2011 Terres et pouvoirs Le scandale grandissant qui entoure la nouvelle vague d'investissements fonciers www.oxfam.org/cultivons Miralvalle, vallée du Polochic, Guatemala, 15 mars 2011. La communauté a été expulsée, les maisons et les cultures détruites © Archive Fundación Guillermo Toriello La nouvelle vague de transactions foncières ne correspond pas aux nouveaux investissements agricoles que des millions de personnes attendaient. Les plus démunis sont les plus durement touchés par l’intensification de la concurrence pour les terres. Il ressort des études d’Oxfam que les habitants sont invariablement perdants face aux élites locales et aux investisseurs nationaux ou étrangers, faute de disposer du pouvoir nécessaire pour faire valoir leurs droits de façon efficace ou pour défendre et promouvoir leurs intérêts. Les entreprises et les gouvernements doivent de toute urgence adopter des mesures visant à améliorer les droits fonciers des personnes qui vivent en situation de pauvreté. Les relations de pouvoir entre investisseurs et communautés locales doivent aussi évoluer si l’on veut que les investissements contribuent à la sécurité alimentaire et aux moyens de subsistance des communautés locales au lieu de leur porter préjudice. Résumé Les investissements internationaux jouent un rôle essentiel dans le développement et la réduction de la pauvreté. Les investissements peuvent améliorer les moyens de subsistance et créer des emplois, des services et des infrastructures lorsqu’ils sont gérés de manière responsable dans un cadre réglementaire efficace. Oxfam l’observe au quotidien dans ses actions et, dans certains cas, travaille en collaboration avec les entreprises pour promouvoir des investissements qui bénéficient directement aux communautés pauvres. Les dernières données sur les investissements fonciers présentent une image très différente. Elles révèlent une forte augmentation de la pression sur la terre, une ressource naturelle dont dépend la sécurité alimentaire de millions de personnes qui vivent en situation de pauvreté. Trop d’investissements ont entraîné la dépossession, la tromperie, la violation des droits de l’homme et la destruction de moyens de subsistance. En l’absence de mesures nationales et internationales permettant de défendre les droits des personnes vivant dans la pauvreté, cette ruée des temps modernes vers les terres agricoles semble vouée à laisser trop de familles pauvres encore moins bien loties, expulsées de leurs terres avec peu ou pas de recours possible auprès de la justice. Dans les pays en développement, 227 millions d’hectares, soit la superficie de l’Europe de l’Ouest, a été vendue ou louée depuis 2001, principalement à des investisseurs internationaux. La majeure partie de ces acquisitions de terres ont eu lieu ces deux dernières années, selon une étude menée actuellement par le Land Matrix Partnership 1. L’accélération récente des acquisitions de terres peut s’expliquer par la crise des prix alimentaires de 2007-2008 et a conduit les investisseurs et les gouvernements à s’intéresser à l’agriculture, après l’avoir négligée pendant des décennies. Mais cet intérêt pour la terre n’est pas un phénomène passager ; c’est une tendance alimentée par de puissants leviers. Les transactions foncières visent très souvent une production destinée à l’exportation d’agrocarburants et de produits alimentaires. On peut souvent à juste titre parler d’« accaparement des terres ». Ce terme fait référence aux acquisitions de terres qui impliquent un ou plusieurs des faits suivants : • violent les droits humains, notamment les droits des femmes à l’égalité ; • bafouent le principe de consentement libre, informé et préalable des usagers des terres, en particulier les peuples autochtones ; • ignorent l’impact sur les rapports économiques, sociaux et de genre, ou sur l’environnement ; • éludent les contrats transparents faisant état d’engagements clairs et contraignants en matière d’emploi et de partage des bénéfices ; • évitent toute planification démocratique, les contrôles indépendants, et une participation significative des acteurs concernés2. 2 Le présent document étudie en détail cinq cas d’accaparement de terres en Ouganda, en Indonésie, au Guatemala, au Honduras et au Sud-Soudan. Il cherche à élucider l’impact de l’accaparement des terres sur les populations pauvres et leurs communautés, à identifier les facteurs sous-jacents entre les entreprises, les communautés locales et les gouvernements des pays d’origine, et à analyser les rôles joués par les investisseurs internationaux et les gouvernements nationaux. Certains de ces exemples relatent l’expulsion forcée – souvent violente – de plus de 20 000 personnes, de leurs terres et de leurs maisons, et la destruction de leurs cultures. D’autres montrent comment les communautés affectées ont été affaiblies en étant exclues des décisions affectant les terres dont elles dépendent. Dans tous les cas, les droits légaux des victimes de l’accaparement de terres n’ont pas été respectés. Là où des expulsions ont déjà eu lieu, la situation est sombre : conflits, perte de sécurité alimentaire, de moyens de subsistance, de logements et de toute perspective d’avenir. La plupart des personnes affectées n’ont pas été indemnisées, ou peu, et ont peiné à recoller les morceaux de leur vie, se trouvant souvent confrontées à des loyers plus élevés, des possibilités d’emploi réduites et des risques pour leur santé. Les faits coïncident malheureusement avec les éléments recueillis dans le cadre de nombreuses autres études récentes sur l’accaparement des terres. C’est l’inverse du développement. Ce qui est rare est précieux. Nombre de gouvernements et d’élites des pays en développement offrent de vastes étendues de terres à des prix sacrifiés pour une agriculture mécanisée à grande échelle. Il s’agit d’un manquement scandaleux aux engagements formulés au niveau intergouvernemental – depuis l’initiative de L’Aquila pour la sécurité alimentaire jusqu’au programme intégré pour le développement de l’agriculture en Afrique (CAADP) – mettant l’accent sur le rôle primordial des petits exploitants, en particulier lorsqu’il s’agit de femmes3. Plutôt que d’obtenir le soutien dont ils ont désespérément besoin, les petits exploitants risquent d’être affaiblis par les types de transactions foncières abordées dans cette note d’information. La nouvelle d’un intérêt croissant pour les terres agricoles devrait réjouir les petits agriculteurs, les éleveurs et autres ayants droit sur les terres. Pourtant, c’est le contraire qui semble se passer. Les ayants droit y perdent face aux élites locales et aux investisseurs nationaux ou étrangers, faute de disposer du pouvoir nécessaire pour faire valoir leurs droits de façon efficace et pour défendre et promouvoir leurs intérêts. Afin d’améliorer le sort de ces personnes, les gouvernements doivent veiller à ce que le transfert de propriété des terres n’intervienne pas sans le consentement libre, informé et préalable des communautés concernées. Les gouvernements nationaux ont un devoir de protection des droits et intérêts des communautés locales et des ayants droit fonciers, un devoir auquel ils ont pourtant manqué dans les cas ici présentés. Au 3 contraire, les gouvernements semblent s’aligner sur la position des investisseurs, les accueillant à bras ouverts avec des prix fonciers avantageux et d’autres incitations financières, les aidant même à vider les terres de leurs habitants. Lorsque des bailleurs de fonds internationaux et des sociétés d’approvisionnement ayant des politiques responsables sont impliqués, il apparaît que les normes et les règles en vigueur n’ont pas présidé aux décisions d’investissement et d’approvisionnement. Alors que les communautés locales pourraient trouver recours par le biais de l’un ou l’autre mécanisme de plainte, cette voie semble sous-utilisée. D’autres initiatives semblent récompenser l’accaparement des terres. De manière générale, la communauté internationale n’a que faiblement réagi à cette vague dévastatrice de spoliation des terres. Les gouvernements des pays hôtes et d’origine, les bailleurs de fonds et sociétés d’approvisionnement, la communauté internationale et les groupes de la société civile ont tous un rôle à jouer. Ils doivent corriger les défaillances à tous les niveaux afin d’assurer le respect des droits humains, de promouvoir les investissements en faveur de l’intérêt général et de lutter contre l’une des tendances les plus alarmantes auxquelles doivent actuellement faire face les populations rurales des pays en développement. Recommandations : Justice pour les cas présentés dans cette note : • Les griefs adressés par les communautés affectées dans les cas discutés dans ce document doivent être résolus. Les droits des communautés affectées par ces accords doivent être respectés et les plaintes traitées. Ceux qui tirent profit de ces acquisitions de terres doivent contribuer à faire en sorte que cela soit le cas. Gouvernements • Les rapports de force doivent être rééquilibrés en faveur des bénéficiaires de droits locaux et des communautés. Les gouvernements devraient adopter des normes internationales fortes en matière de bonne gouvernance relative aux régimes fonciers et à la gestion des ressources naturelles. Gouvernements qui accueillent des investissements • Les gouvernements des pays hôtes doivent respecter et protéger les droits d’usage des terres existantes et veiller à assurer le respect du principe de consentement libre, informé et préalable, et à ce que les femmes aient les mêmes droits d’accès à et de contrôle de la terre que les hommes. Investisseurs • Les investisseurs doivent respecter tous les droits d’usage existants sur les terres, veiller au respect du principe de consentement libre, informé et préalable dans tous les accords, et rechercher des alternatives au transfert de droits fonciers des petits producteurs de denrées alimentaires. Ils doivent être guidés par 4 des évaluations d’impacts environnementaux et sociaux adaptées (y compris sur l’utilisation de l’eau) et traiter les questions de sécurité alimentaire. Organismes financiers et acheteurs • Les organismes financiers et les acheteurs doivent accepter la responsabilité de la chaîne d’approvisionnement dans son ensemble. Ils doivent exiger que toutes les opérations agricoles qu’ils financent ou utilisent en tant que fournisseurs respectent les principes énoncés ci-dessus, et remédient aux problèmes existants. Gouvernements des pays d’origine • Les gouvernements des pays d’origine doivent exiger des sociétés qui investissent à l’étranger qu’elles divulguent pleinement la nature de leurs activités, et veiller à ce que des normes et des garde-fous soient mis en œuvre pour protéger les petits producteurs de denrées alimentaires et les populations locales, y compris par le biais d’organisations de financement du développement telles que la branche de la Banque mondiale responsable des prêts aux entreprises privées, la Société financière internationale. Ils doivent exclure de la législation nationale les mesures qui soutiennent les achats risqués de terres à grande échelle, incluant les politiques incitatives en matière d’agrocarburants, et éviter d’en introduire de nouvelles. Citoyens • À travers leur vote, leur choix en tant que consommateurs ou leur fonds de pensions et autres investissements, les citoyens peuvent demander aux investisseurs et aux traders de rendre des comptes. • Les organisations de la société civile, ainsi que les médias et les instituts de recherche, peuvent utiliser les mécanismes de responsabilisation, rendre publiques les mauvaises pratiques, reconnaître les bonnes pratiques et contribuer à renforcer la transparence. 5 1 Schéma 1: Transactions foncières mondiales L’acquisition de terres : tendances et moteurs Introduction Les investissements internationaux jouent un rôle essentiel dans le développement et la réduction de la pauvreté. Les investissements peuvent améliorer les moyens de subsistance, créer des emplois, des services et des infrastructures lorsqu’ils sont gérés de manière responsable dans un cadre réglementaire efficace. Oxfam l’observe au quotidien dans ses actions et dans certains cas, travaille en collaboration avec les entreprises pour promouvoir des investissements qui bénéficient directement aux communautés pauvres4. Les dernières données sur les investissements fonciers présentent une image très différente. Elles racontent l’histoire d’une pression qui augmente rapidement sur la terre, une ressource naturelle dont dépend la sécurité alimentaire de millions de personnes qui vivent en situation de pauvreté. Trop d’investissements ont entraîné la dépossession, la tromperie, la violation des droits de l’homme, et la destruction des moyens de subsistance. En l’absence de mesures nationales et internationales permettant de défendre les droits des personnes vivant en situation de pauvreté, cette ruée des temps modernes vers les terres agricoles semble vouée à laisser trop de familles pauvres encore moins bien loties, souvent expulsées de leurs terres avec peu ou pas de recours possible auprès de la justice. 227 millions d’hectares ont fait l’objet d’acquisitions depuis 2001, soit l’équivalent de la taille de l’Europe du Nord-Ouest. Source : Land Matrix Partnership La Banque mondiale semble très profondément partagée. Alors que le rapport souscrit pleinement et accueille à bras ouverts l’agenda de la mondialisation, le contenu sous-jacent du texte se contredit à chaque page. Analyse du rapport de la Banque mondiale, « Rising interest in Farmland » [Regain d’intérêt pour les terres agricoles] par le journal britannique TheTelegraph.5 Un phénomène croissant : Les recherches préliminaires menées par le Land Matrix Partnership6 indiquent que depuis 2001, 227 millions d’hectares ont été vendus, loués, cédés ou font l’objet de négociations dans le cadre de transactions foncières à grande échelle, la plupart depuis 2008 et impliquant des investisseurs internationaux. Identifier l’exacte ampleur du phénomène est incroyablement difficile en raison du manque de transparence et du secret qui entoure souvent les accords. Les données du Land Matrix Partnership sont rassemblés à partir de sources diverses, rapports gouvernementaux, rapports de recherche académique, sites Internet d’entreprises, rapports des médias, et les quelques contrats qui sont disponibles. À ce jour, 1 100 transactions, équivalant à 67 millions d’hectares, ont été vérifiées par le Land Matrix Partnership. La moitié des terres se situe en Afrique, couvrant une superficie presque équivalente à la taille de l’Allemagne. Plus de 70 % du total des transactions vérifiées relèvent du domaine agricole7. Alors 6 que le travail se poursuit pour vérifier toutes les données, il apparait évident que l’ampleur du phénomène est beaucoup plus grande qu’on ne le pensait8. Comme cela sera observé dans cette note d’information, de puissants leviers expliquent l’intérêt croissant pour l’acquisition de terres agricoles, avec de graves conséquences pour les usagers antérieurs et les détenteurs de droits sur les terres. Certaines acquisitions prennent la forme d’« accaparement de terres », au sens où les a récemment définis la Coalition internationale pour l’accès à la terre (ILC) (voir encadré 1 : la Déclaration de Tirana). Les cinq études de cas présentées dans cette note en sont l’illustration. Alors que l’augmentation d’acquisitions de terres à grande échelle était à l’origine décrite en des termes neutres, voire enthousiastes, par les organisations intergouvernementales, y compris la Banque mondiale et diverses agences des Nations Unies, le ton est devenu de plus en plus sceptique, voire critique. La crainte croissante est que cette nouvelle vague d’investissements cause plus de mal que de bien si l’accaparement de terres n’est pas stoppé. Il existe peu (voire pas du tout) d’exemples documentés d’acquisitions de terres à grande échelle ayant eu un impact positif sur les communautés locales. En revanche, il existe de nombreux exemples, cités par les médias, des universitaires, la société civile ou des organes intergouvernementaux, qui mettent le doigt sur des accords fonciers n’ayant pas apporté de bénéfices, et qui ont détruit des moyens de subsistance et affaibli les droits de l’homme. Les chercheurs mettent aujourd’hui publiquement les investisseurs au défi de leur fournir des accords fonciers en faveur des populations pauvres et propices au développement qui soient documentés10. Dans son récent rapport sur les terres présenté au Comité mondial de la Sécurité alimentaire (CSA), le groupe d’experts de haut niveau sur la sécurité alimentaire et la nutrition (HLPE/FSN) a conclu : « Il est largement reconnu que davantage d’investissements dans le domaine agricole sont nécessaires pour augmenter les rendements et améliorer la sécurité alimentaire dans de nombreuses régions du monde. De tels investissements fonciers peuvent-ils contribuer à l’amélioration de la productivité agricole et des moyens de subsistance en milieu rural ? L’expérience de cette course aux terres montre à ce jour très peu d’exemples qui appuient cette idée. Au lieu de cela, les investissements à grande échelle portent préjudice à la sécurité alimentaire, aux revenus, aux moyens de subsistance, et à l’environnement pour les populations locales12 ». Compte tenu du rôle central que le foncier jour en matière de sécurité alimentaire, de moyens de subsistance et de réduction globale de la pauvreté, c’est un sérieux motif de préoccupation. Encadré 1 : Déclaration de Tirana La Coalition internationale pour l’accès à la terre (ILC) compte 116 organisations, comprenant des groupes communautaires, Oxfam ou encore la Banque mondiale. Lors de son assemblée générale à Tirana, en Albanie, le 26 mai 2011, l’ILC a dénoncé et défini l’accaparement de terres : 7 Le risque de ne pas investir en Afrique : passer à coté d’opportunités de croissance et de bénéfice. Susan Payne, Directrice générale, Emergent, Emvest. Sommet sur la sécurité alimentaire, Cap Town, mai 20119 Les terres agricoles seront l’un des meilleurs investissements de notre temps. Jim Rogers, Investisseur. 11 Nous dénonçons toute forme d’accaparement de terres, qu’elle soit nationale ou à l’étranger. Nous dénonçons les appropriations de terres au niveau local, en particulier du fait d’élites locales puissantes, au sein des communautés ou entre membres d’une même famille. Nous dénonçons les accaparements de terres à grande échelle, qui se sont accéléré de façon massive au cours des trois dernières années, et que nous définissons comme des appropriations ou des concessions qui correspondent à une ou plusieurs des situations suivantes : (i) Violation des droits de l’homme, en particulier des droits d’égalité entre hommes et femmes ; (ii) Transactions qui ne sont pas fondées sur le consentement libre, informé et préalable des usagers de terres concernés ; (iii) Transactions qui ne sont pas fondées sur une évaluation approfondie, ou sont opérées sans considération de l’impact social, économique et environnemental, y compris de la façon dont elles sont générées (iv) Transactions qui ne sont pas fondées sur des accords transparents qui spécifient des engagements clairs et contraignants concernant l’emploi, et le partage des bénéfices. (v) Transactions qui ne sont pas fondées sur une planification démocratique efficace, un contrôle indépendant, et une participation significative. Source : Coalition internationale pour l’accès à la terre (ILC) (2011) « Tirana Déclaration: Securing land access for the poor in times of intensified natural resources competition », http://www.landcoalition.org/about-us/aom2011/tirana-declaration, (dernière consultation en juillet 2011) De nombreux investissements [...] ne se sont pas montrés à la hauteur de nos propres espérances et, au lieu de générer des bénéfices durables, ont contribué à une perte d’actifs et ont laissé les populations dans des situations plus graves que si elles n’avaient pas connu ces investissements. En fait, même si un effort a été réalisé pour couvrir une large gamme de situations, les études de cas confirment que dans de nombreux cas les bénéfices étaient plus faibles que prévu ou ne se sont pas matérialisés du tout. Banque mondiale (2011) Rising Global Interest in Farmland: Can it Yield Sustainable and Equitable Benefits?’13 De nouvelles pressions foncières La vague actuelle de transactions foncières n’est pas fondamentalement différente des précédentes luttes pour l’acquisition de terres. La différence réside dans l’échelle et la rapidité avec laquelle ces opérations interviennent. Cela peut s’expliquer par la crise des prix alimentaires de 2007 à 2008, qui a conduit les investisseurs et les gouvernements à s’intéresser à l’agriculture après l’avoir négligée pendant des décennies, et les premiers signes de la crise financière mondiale, qui a poussé les investisseurs à rechercher de nouvelles opportunités. Le foncier et l’agriculture sont apparus aux yeux d’un grand nombre de personnes comme des valeurs sûres14. L’intérêt actuel considérable en faveur du foncier ne semble pas prêt de disparaître. Au contraire, il va s’intensifier puisque l’augmentation de la demande ne va probablement pas être satisfaite par l’expansion des zones de production. Il existe de nombreux facteurs déterminants qui président à la tendance actuelle. Toute forme de foncier existante sera très certainement prisée. L’un des facteurs est la population mondiale, qui devrait passer de sept milliards en 2011 à neuf milliards en 2050. Un autre déterminant important est l’économie mondiale, qui devrait tripler d’ici à 2050, exigeant des ressources naturelles et agricoles de plus en plus rares15. Partout dans le monde, les régimes alimentaires changent au profit de produits nécessitant une production intensive en terres agricoles, tels 8 que les protéines animales (viande, produits laitiers, œufs et poissons) et les plats cuisinés16. L’huile de palme est devenue l’huile alimentaire la plus consommée au monde et peut être trouvée dans près de la moitié de tous les aliments emballés et produits d’hygiène présents sur les étalages des supermarchés17. La production devrait doubler d’ici à 2050, augmentant la surface des terres cultivées dans le monde entier pour atteindre jusqu’à 24 millions d’hectares - soit six fois la superficie des Pays-Bas18. L’énorme augmentation de la demande alimentaire devra être compensée par des ressources foncières qui subissent la pression croissante du changement climatique, de l’épuisement de l’eau, des contraintes d’autres ressources, et celle de la production d’agrocarburants, la séquestration du carbone et la conservation des forêts, la production de bois et les cultures non vivrières. L’eau, élément vital pour l’agriculture, est déjà plus rare que la terre et devient un facteur déterminant des investissements fonciers. Près de trois milliards de personnes vivent dans des zones où la demande en eau dépasse l’offre19. En 2000, 500 millions de personnes vivaient dans des pays souffrant chroniquement de pénuries d’eau ; en 2050, ce nombre aura augmenté jusqu’à plus de quatre milliards20. On estime qu’avant 2030 la demande en eau devrait avoir augmenté de 30 %21. La production de produits agricoles non alimentaires est également en expansion, depuis les produits traditionnels tels que le textile, le bois et le papier, jusqu’à des produits modernes comme les agrocarburants et les « bioplastiques », qui ont le vent en poupe dans le contexte du changement climatique et de l’inévitable épuisement des combustibles fossiles. Des mesures incitatives, telles que l’objectif européen qui consiste à incorporer 10 % des carburants destinés au transport grâce aux sources renouvelables d’ici à 2020, signifient qu’il existe maintenant une pression importante sur le foncier pour la production d’agrocarburants, ce qui représente une cause importante de la hausse des prix alimentaires et de l’insécurité alimentaire22. La rareté des terres et la volatilité des prix des denrées alimentaires sur le marché mondial ont conduit les pays riches, dépendants des importations de denrées alimentaires, à acquérir de grandes quantités de terres ailleurs pour produire la nourriture nécessaire à leurs besoins domestiques. Alors que certains investisseurs pourraient prétendre avoir une expérience dans la production agricole, nombre d’entre eux pourraient n’acheter des terres qu’à des fins spéculatives, anticipant des hausses de prix dans les prochaines années (pratique connue sous le nom de « capitalisation foncière »). En 2011, l’analyse de la Banque mondiale portant sur 56 millions d’hectares de transactions à grande échelle a conclu que rien n’a encore été fait pour 80 % des terres concernées, ce qui suggère un taux important de capitalisation foncière.23 La situation décrite ci-dessus se présente à un moment où la part globale des terres disponibles pour l’agriculture a atteint un sommet24. En réalité cette part se réduit, puisque le monde perd des terres agricoles sous l’effet de l’urbanisation et de la dégradation des sols25. 9 Encadré 2 : Mythes sur les terres agricoles Mythe : beaucoup de terres demeurent inutilisées, attendant d’être exploitées. Les bases de données statistiques et les images satellite ont conduit les chercheurs et les investisseurs à formuler des affirmations sur la disponibilité suffisante de terres en friche. Ainsi, en 2010, la Banque mondiale citait des études concluant que 445 millions d’hectares de terres inutilisées et à fort potentiel agricole étaient disponibles, terres non boisées, 2 non protégées et habitées par moins de 25 personnes/km (soit 20 hectares/foyer). Toutefois, ces données macro ont peu de valeur si elles ne sont pas corroborées avec l’expérience sur le terrain. Les images satellite ne montrent pas la façon dont la terre est utilisée pour la culture itinérante, le pastoralisme, la chasse et la cueillette, et d’autres utilisations fondamentales des terres dites « en friche ». Le HLPE/FSN a affirmé : « il est rare que des terres de valeur qui soit ne soient déjà utilisées d’une certaine manière, soit ne fournissent un service important en faveur de l’environnement. Par conséquent, toute appropriation de terres réputées « disponibles » imposera un certain coût, que ce soit pour l’usager des terres existantes, ou pour les services environnementaux procurés par ces terres » En de nombreux endroits, la contrainte réelle pour l’agriculture est l’eau, pas la terre. Les recherches menées par Deutsche Gesellschaft für Internationale Zusammenarbeit (GIZ) sur les transactions foncières à grande échelle dans la région de l’office du Niger au Mali ont montré que pendant la saison sèche, il n’y a pas d’eau qui reste inutilisée. L’eau qui sera utilisée par les nouveaux projets d’irrigation prévus le sera au détriment des exploitants traditionnels au Mali, en aval au Niger et au Nigeria. De même, Lester Brown a signalé que les nouvelles grandes transactions foncières en Éthiopie et au Sud-Soudan sont vouées à affecter le débit du fleuve dans la partie de l’Égypte dépendante du Nil située en aval du fleuve. Sources : Banque mondiale (2010) « Rising Global interest in Farmland :Can it Yield Sustainable and Equitable Benefits? » ; groupe de haut niveau d’experts sur la sécurité alimentaire et la nutrition (2011)« Le droit foncier et les investissements internationaux dans l’agriculture », Rome : Comité sur la sécurité alimentaire mondiale, Rapport n°2 du HLPE, juillet 2011 ; Johannes Baumgart (2011) « Assessing the contractual arrangements of large-scale land acquisitions in Mali with special attention to water rights », Berlin : GIZ ; Lester Brown (2011) « When the Nile runs dry », New York Times, 1er juin, http://www.nytimes.com/2011/06/02/opinion/02Brown.html?_r=2&partner=rssnyt&emc=rss (dernière consultation en juillet 2011) Mythe : La réforme foncière ne fonctionne pas. Idéologie et politique nourrissent l’idée largement acceptée que la réforme des politiques foncières ne fonctionne pas. Toutefois les réussites de la réforme des politiques foncières s’illustrent notamment en Indonésie, en Malaisie, en Thaïlande et en Chine. Leurs secteurs agricoles sont tous principalement basés sur des propriétaires-exploitants de petites fermes familiales. Dans le cas de la Chine, les structures agraires des petits exploitants ont été créées par la réforme des politiques foncières. Dans le cas de la Thaïlande, la législation du dix-neuvième siècle a fixé une limite de quatre hectares sur les terres agricoles librement accessibles, et a limité l’émergence de plus grands domaines. Le Japon a développé une réforme des politiques foncières complète et performante qui comprenait aussi des plafonds stricts d’acquisition de propriétés foncières. Sources : Rogier van den Brink, Hans Binswanger, John Bruce, Frank Byamugisha et Glen Thomas (2006) « Consensus, Confusion and Controversy: Selected Land Reform Issues in subSaharan Africa », Document de travail de la Banque mondiale no 71, Washington, D.C.: Banque mondiale ; Ha Joon Chang (2009) ‘Rethinking public policy in agriculture: lessons from history, distant and recent’, Journal of Peasant Studies, 36(3): 477-515. 10 Sécurité foncière et sécurité alimentaire vont de pair L’accès à la terre est essentiel pour les petits producteurs de denrées alimentaires. Les difficultés d’accès à la terre sont caractéristiques des « ouvriers agricoles sans terre ». Le perdre et se retrouver sans terre est redouté par de nombreux petits exploitants, car cela signifie perdre sa sécurité alimentaire et les opportunités pour son développement. Ce sont les groupes les plus marginalisés de la société qui sont les plus sensibles à l’accaparement des terres - faisant de la prévention une question cruciale pour la réduction de la pauvreté et la défense des droits humains. La terre n’est pas seulement un bien de production important. Même pour les familles qui ont cessé de vivre directement de la terre, elle sert souvent de filet de sécurité important lorsque d’autres projets économiques échouent ou lorsque l’économie n’offre plus d’opportunités. La terre a également de multiples autres usages (soidisant) secondaires, qui sont vitaux pour la sécurité des moyens de subsistance de la famille. Elle peut fournir du fourrage, des noix, des fruits, des racines, des herbes médicinales et de cuisine, des teintures, des cordes, du bois et des matériaux pour la toiture et les barrières. Nombre de ces ressources sont disponibles sur les terres communes, et sont souvent particulièrement importantes pour les femmes. La terre procure également un espace pour des événements sociaux, culturels, spirituels et rituels, et à ce titre elle est essentielle à la conservation de l’identité et au bien-être d’une communauté et de ses membres. De nombreux chercheurs ont montré que l’accès sécurisé à la propriété foncière contribue à des réductions significatives de la faim et de la pauvreté.27 Cela se traduit du niveau micro au niveau macro, comme l’a montré l’analyse de la Banque mondiale relative aux politiques foncières pratiquées dans 73 pays entre 1960 et 2000. Les pays qui ont commencé avec une répartition plus équitable des terres ont atteint des taux de croissance deux à trois fois plus élevés que ceux dont la distribution des terres était initialement moins équitable28. Néanmoins, l’accès équitable et le contrôle des terres ne sont pas prioritaires dans l’agenda des décideurs nationaux et internationaux. Pour les femmes partout dans le monde, le manque d’accès et de contrôle sur la terre est un déterminant (et un résultat) majeur de l’inégalité des sexes. Au Guatemala, par exemple, 8 % des exploitants détiennent 78 % des terres en production ; des petits exploitants qui contrôlent le reste des terres, seulement 8 % sont des femmes29. Dans les zones rurales, le manque d’accès à la terre contraint de nombreuses femmes à proposer leurs services sur des exploitations produisant de maigres cultures de subsistance, où elles sont moins bien payées que les hommes. Les travailleuses agricoles peuvent aussi souffrir de violences sexuelles et être victimes de harcèlement, de discrimination, et de dévalorisation de leur travail. Les femmes vivant en milieu rural se retrouvent souvent avec la double charge de prévoir et de gérer le foyer lorsque les hommes émigrent à la recherche de travail, une autre conséquence de la pénurie de terres30. L’expérience démontre que tout changement dans les relations foncières est susceptible d’engendrer une discrimination systémique entre les sexes et qu’il n’y a aucune raison de supposer a priori que les changements [induits par les nouvelles pressions commerciales sur le foncier] seront de nature différente. Elizabeth Daley, (2011) Gendered impacts of commercial pressures on land, ILC/CIRAD/ Mokoro26 11 Depuis le début de la réforme agraires dans les années 1970, l’État ne nous a jamais pris en compte, nous les femmes. Le fait de ne pas avoir accès à la terre, même pour faire pousser un bananier, est très dur à vivre. Le fait de ne pas être digne de la terre, d’une maison, est un lourd fardeau qui pèse sur nous, les femmes. Nous avons réalisé cette situation, et avons décidé de lutter pour notre accès à la terre. Fernanda Rodriguez, 40 ans, Bajo Aguán, au Honduras. Les femmes sont mal représentées dans les conflits fonciers, au cours desquels elles font face à un certain nombre de difficultés31. Une législation discriminatoire est aggravée par le sexisme de ceux qui appliquent les lois, et les femmes ont souvent peu d’opportunités de participer aux processus de décisions concernant les nouvelles lois, les nouveaux projets ou contrats. Elles ont également tendance à avoir moins de revenus (espèces) que les hommes, réduisant ainsi leur capacité à acheter des terres quand elles sont disponibles. S’ajoute à cela le fait que la violence sexiste est souvent une caractéristique commune des conflits concernant la propriété foncière. Les études menées sur les accaparements de terres en Afrique montrent que les femmes reçoivent un traitement injuste.32 Tout d’abord, les droits fonciers des femmes sont moins sûrs et plus aisément pris pour cible. Ils dépendent également davantage d’utilisations secondaires des terres, ce qui tend à être ignoré dans le cadre de grandes opérations. Par ailleurs, si les femmes sont les principaux exploitants, ce sont les hommes qui contrôlent effectivement les terres et les revenus qui en découlent, même si ces derniers sont le fruit du travail des femmes. En pratique, une nouvelle opportunité commerciale signifie en effet souvent que les hommes assument le contrôle des terres au détriment de l’accès à ces terres pour les femmes. Ainsi, de nouvelles sources de revenus de la terre sont susceptibles de représenter un fardeau pour les femmes et de ne bénéficier qu’aux hommes. La nouvelle concurrence pour la terre entre les agrocarburants et les cultures vivrières, qui conduit à une moindre disponibilité des denrées alimentaires et à des prix plus élevés, est également susceptible d’avoir un impact plus fort sur les femmes que sur les hommes, puisque les femmes ont tendance à assumer la responsabilité de nourrir la famille33. Encadré 3 : Mythes sur les transactions foncières Mythe : Les nouveaux projets fonciers se concentrent sur des terres peu productives. En dépit des affirmations contraires, les investisseurs ciblent les meilleures terres. Ils cherchent la terre ayant un accès aux ressources en eau, des sols fertiles, des infrastructures et la proximité aux marchés pour faciliter la rentabilité et la viabilité de leurs entreprises. 12 Cette carte compare l’emplacement des nouvelles concessions agricoles à grande échelle (points noirs) avec la densité de population (les teintes grises plus sombres représentent les plus fortes densités de population) dans la province de Luang Prabang, au Laos. Les projets à grande échelle ont tendance à être situés là où vivent la plupart des gens. Une analyse plus poussée montre que ce sont aussi les endroits où les taux de pauvreté sont relativement faibles, et où la terre était déjà utilisée pour la production de denrées alimentaires - par opposition aux terres vides, inutilisées, aux terres marginales dans les régions pauvres. Source : Université de Berne, Suisse, Centre pour le Développement et l’Environnement (CDE). Mythe : Les projets fonciers contribueront à apporter sécurité alimentaire et énergétique. Les travaux de recherche d’Oxfam menés en Éthiopie, au Ghana, au Mali, au Mozambique, au Sénégal et en Tanzanie ont révélé que la majorité des transactions foncières basées sur l’agriculture en Afrique correspondent à des terres dont les produits sont destinés à l’exportation, notamment les agrocarburants et les fleurs coupées. Au Mozambique, où environ 35 % des ménages se trouvent en situation d’insécurité alimentaire chronique, entre 2007 et 2009, 32 000 hectares sur les 433 000 approuvés pour l’investissement agricole étaient destinés à des cultures vivrières. Les clauses sans restrictions des contrats d’exportation, combinées au fait que les producteurs de denrées alimentaires à petite échelle perdent leurs actifs de production, pourraient bien aggraver la sécurité alimentaire plutôt que de l’améliorer. Par ailleurs, la vision à court terme des investisseurs peut les inciter à privilégier des pratiques agricoles non durables, au préjudice de la production agricole à long terme. Les études montrent aussi que les coûts de production actuels des agrocarburants sont prohibitifs pour les pays africains, ce qui signifie que les matières premières doivent être exportées vers les marchés américains ou européens pour être économiquement viables. Sources : Tinyade Kachika (2010) ‘Land-grabbing in Africa: A Review of the Impacts and the Possible Policy Responses », Oxford : Programme international d’Oxfam centré sur l’Afrique Mythe : Les projets créeront des emplois. Même si cela est présenté comme un des principaux avantages de l’acquisition de terres à grande échelle, les exigences en matière de création d’emplois locaux sont absentes des contrats, et se matérialisent rarement dans la pratique. Même si le manque de contrôle rend la situation difficile à quantifier, les emplois semblent être rares, de courte durée (du fait que la phase de plantation prend fin ou que le projet s’oriente vers une plus grande mécanisation), ils sont saisonniers et mal rémunérés. L’étude de l’analyse de l’agro-investissement en Afrique occidentale montre que très peu d’emplois ont été créés pour les populations locales, tandis que les éleveurs et les femmes, qui dépendent de la terre, des arbres et de l’eau dans les espaces communs pour leurs activités économiques, ont souffert de la réduction de l’accès aux ressources. Sources : Lorenzo Cotula (2011) « Land Deals in Africa: What is in the contracts? » Londres : Institut International pour l’Environnement et le Développement ; Thea Hilhorst, Joost Nelen, Nata Traoré (2011) « Agrarian change below the radar screen: Rising farmland acquisitions by domestic investors in West Africa: Résultats d’une étude menée au Benin, au Burkina Faso et au Niger », document présenté dans le cadre de la « Conférence internationale sur l’accaparement de terres au niveau mondial », Université du Sussex, 6-8 avril 2011. Mythe : Les projets apporteront des recettes fiscales. Les gouvernements des pays hôtes ont tendance à renoncer à des bénéfices en offrant des incitations fiscales dans le cadre de la course au financement des investissements. En 2008, le gouvernement du Pakistan a offert « des exonérations fiscales, des importations de matériel libres de droits, et 100 % de propriété foncière dans les zones franches dans les 13 secteurs de l’agriculture, de l’élevage, et des produits laitiers », dans le but d’attirer les investisseurs étrangers. L’impôt sur le revenu n’est généralement payable qu’une fois que le projet d’investissement devient rentable. Même si le gouvernement du pays hôte n’a pas renoncé aux bénéfices fiscaux, il manque souvent de capacité ou de volonté politique pour réguler et contrôler les investissements, faire respecter les termes d’un contrat, ou pour percevoir des impôts. La Banque mondiale, l’Institut International pour l’Environnement et le Développement (IIED), et les études d’Oxfam en Afrique ont tous mené à la conclusion que les impôts ont rarement été collectés. Sources : Cotula (2011) op. cit ; Kachika (2010) op. cit ; Banque mondiale (2010) Opportunité ou risque ? Les investisseurs étrangers peuvent facilement obtenir, et ce presque gratuitement, des milliers d’hectares, tandis que si nous, les petits producteurs locaux kenyans, nous voulons étendre notre zone de production, c’est impossible. Qu’est-ce qui ne tourne pas rond ? Stephen Muchiri, Kenya, Président de la Fédération des exploitants d’Afrique de l’Est. Ce n’est pas seulement la « demande » de la part d’investissements étrangers qui est le moteur de la ruée mondiale sur les terres. Les entreprises nationales font également la promotion des opportunités offertes par l’acquisition de terres auprès des populations locales. Les agences de promotion des investissements agricoles s’emploient activement à proposer ces terres sur le marché international, au nom de gouvernements soumis à des pressions pour stimuler le développement économique et améliorer la balance des paiements.34 Il existe également des motivations personnelles pour nombre d’entre eux : le baromètre d’évaluation de la corruption dans le monde élaboré par Transparency International signalait que 15 % des personnes ayant eu affaire aux services d’administration foncière ont dû payer des potsde-vin35. Certains gouvernements, notamment en Afrique, se risquent à une concurrence dans une « course vers le bas » pour attirer les investisseurs36. Les incitations fournies comprennent les importations de biens d’équipement utilisés pour des projets en franchise de taxes, le manque de restrictions sur l’utilisation des terres pour des cultures particulières ou des objets particuliers (par ex. : les exportations), et l’autorisation d’utiliser les sources d’eau souterraine gratuitement37. Il s’agit d’une situation choquante au regard des engagements formulés au niveau intergouvernemental - depuis l’Initiative pour la sécurité alimentaire de L’Aquila jusqu’au programme intégré pour le développement de l’agriculture en Afrique (CAADP) - qui ont mis en évidence le soutien en faveur d’un rôle primordial des petits exploitants, en particulier lorsqu’il s’agit de femmes38. Les petits producteurs, particulièrement les femmes, peuvent en effet jouer un rôle crucial dans la réduction de la pauvreté et dans la sécurité alimentaire. Mais pour ce faire, ils ont besoin d’investissements en infrastructures, marchés, traitement, stockage, vulgarisation et recherche. Or ces acquisitions de terres à grande échelle ne font rien ou peu pour répondre à leurs besoins. Les petits producteurs ont un potentiel inexploité de connaissances locales, de la terre et du travail à offrir, qui pourraient compléter les capitaux, la technologie et l’accès aux marchés que les investisseurs apportent. Par exemple, l’agriculture contractuelle, impliquant des contrats d’approvisionnement convenus à l’avance entre les exploitants et les entreprises acheteuses, peut permettre aux exploitants d’accéder aux marchés et d’améliorer la 14 stabilité des revenus39. Toutefois, dans le contexte actuel de la ruée vers les terres, les actifs des petits producteurs sont souvent ignorés et leurs droits et intérêts violés. Pour que l’intérêt accru dans le domaine agricole devienne une opportunité plutôt qu’un risque pour la sécurité alimentaire et la réduction de la pauvreté, les mesures suivantes doivent être mises en place : • Les petits producteurs alimentaires doivent bénéficier d’une aide afin de pouvoir profiter des nouvelles opportunités présentes sur le marché mondial. En particulier, leurs droits fonciers doivent être renforcés, et ils doivent être habilités à défendre leurs droits et leurs intérêts face à des pressions concurrentes sur les terres ; • Les gouvernements doivent renforcer et protéger les droits des petits producteurs à bénéficier de la terre. Cela concerne notamment les gouvernements des pays d’origine des compagnies impliquées dans les investissements agricoles ; • Les entreprises ont aussi la responsabilité de respecter les droits humains, d’exercer un contrôle raisonnable sur leurs opérations, et d’exiger la même chose de leurs partenaires commerciaux, qu’il s’agisse de financiers, d’acheteurs ou de fournisseurs. 15 2 Expérience sur le terrain L’augmentation des investissements dans le domaine agricole devrait représenter une bonne nouvelle pour les petits producteurs, et d’autres personnes détenant des droits d’usage des terres, en offrant de nouveaux débouchés, des prix plus élevés, des emplois de meilleure qualité et plus nombreux. La réalité est bien différente. Les titulaires de droits locaux perdent leurs moyens de subsistance - et même leurs vies - dans une nouvelle version de la « malédiction des ressources », où les investissements en ressources naturelles des pays riches causent plus de tort que de bien40. C’est certainement l’expérience des communautés locales dans les cinq cas étudiés ci-après. Sud-Soudan Au Sud-Soudan, la plus jeune nation de l’Afrique l’agriculture à petite échelle est la principale source de subsistance pour 80 % des ménages. Une évaluation menée en janvier 2011 a révélé que 36 % de la population vivait dans l’insécurité alimentaire, et que 9,7 % se trouvaient en situation d’insécurité alimentaire grave41. Les conflits localisés liés à la terre et à l’eau sont fréquents et représentent un défi pour la stabilité et le développement. La nouvelle difficulté du SudSoudan, qui pourrait faire dérailler ses perspectives socio-économiques à long terme, sont les acquisitions de terres à grande échelle. Entre 2007 et 2010, les entreprises étrangères, les gouvernements et les individus ont recherché ou acquis au moins 2,64 millions d’hectares (26 400 km²) pour un usage agricole, les agrocarburants, et les projets forestiers. La région, d’une superficie équivalente à celle du Rwanda, représente près de 10 % de la masse terrestre du Sud-Soudan. Pour un nouveau pays, encore ébranlé par des années de conflit, cette vague d’acquisitions peut porter préjudice aux moyens de subsistance des personnes affectées. En mars 2008, Nile Trading and Développement Inc (NTD), une société à but lucratif constituée en vertu des lois du Delaware, a conclu un bail de 49 ans pour les 600 000 hectares (6000 km²) de terres communautaires extrêmement fertiles situées dans le Comté de Lainya, État d’Équatoria central (CES)42. L’accord a été conclu entre NTD et la « Coopérative Mukaya Payam ». Selon la communauté Mukaya Payam, qui vit dans le Comté de Lainya, cette « coopérative » n’est pas une entité légalement enregistrée, n’a pas de siège local, ne les représente pas, et se compose de trois « fils influents de la région »43. Les trois signataires de la « coopérative » sont de la même famille, et notamment le chef suprême, l’autorité tribale supérieure des Payams. Les deux autres occupaient des postes de fonctionnaires, fonction dont ils auraient abusé, selon certains membres de la communauté, pour obtenir la signature de l’accord44. 16 La transaction, conclue entre la société et la « coopérative » (le 11 mars 2008), a été suivi par accord de location de terres entre le gouvernement de CES et la « coopérative » (6 octobre 2008), qui portait sur la même portion de 600 000 hectares de terres. La communauté affirme avoir été contournée puisque la « coopérative » ne les représentait pas. Interrogée par Oxfam, NTD a déclaré qu’elle avait accepté la position qui lui avait été présentée à l’origine ; « Nous avons toujours pensé que la Coopérative de Mukaya Pyama représentait les communautés Mukaya Payam [sic] ». Toutefois, Oxfam considère que la nature de la transaction, la superficie des terres comprises dans cette location (qui s’étendent bien au-delà des terres contrôlées par la communauté Mukaya Payam), et la tradition de propriété communautaire des terres au Sud-Soudan auraient dû inciter NTD à vérifier de manière indépendante l’autorité de la « coopérative » pour donner son accord dans le cadre de cette transaction. NTD ajoute que « lorsque... NTD a reçu le document d’enregistrement et les lettres consécutives de la part des autorités confirmant l’enregistrement, NTD pensait que la surface en hectares était exacte. » NTD déclare avoir recherché d’autres données cartographiques et des données relatives aux frontières auprès des autorités gouvernementales et de plus avoir mené une étude aérienne préliminaire, mais sans succès, et qu’il serait nécessaire d’entreprendre une enquête formelle et vérifiable une fois que les conditions justifieront la dépense des fonds. « Ces conditions ne sont réunies que maintenant », déclare-t-elle. Contrairement à certaines autres acquisitions de terres à grande échelle, la communauté Mukaya, partiellement galvanisée par la diaspora Mukaya à Juba et à l’étranger, a monté et organisé une campagne initialement victorieuse contre la transaction conclue avec NTD. Une commission locale, avec des représentants intercommunautaires, a présenté une pétition au gouverneur de CES pour faire annuler la transaction.45 La décision incombe au gouverneur de CES, qui a soutenu la Communauté verbalement. Toutefois, avant de parler d’une annulation, il faut encore que cet engagement oral soit officiellement documenté46. Les responsables au niveau du comté et de l’État estiment que le bail ne peut pas aujourd’hui et ne pourra pas dans le futur aller de l’avant en raison de la légitimité douteuse de la « Coopérative », de la taille du terrain (qui s’étend au-delà de Mukaya Payam), et de l’absence de procédure dans les règles. De manière exceptionnelle, le gouvernement semble être à ce stade aux côtés de la communauté, plutôt que de l’entreprise. Cette attitude ne doit pas être considérée comme la norme pour l’acquisition de terres au SudSoudan. Selon le recensement de 2008, la population du comté de Lainya (89 36047 ) est largement dépendante de l’agriculture de subsistance. Ses cultures vivrières sont le dura et le maïs, mais elle produit aussi : des arachides, des patates douces, du manioc, du sésame, du niébé et des légumes. En vertu du contrat de location signé avec NTD, les communautés situées au-delà des terres Mukaya Payam abandonnent le droit de s’opposer à l’activité suivante de NTD (dans les limites autorisées par les lois du Sud-Soudan) : l’exploitation des ressources 17 en bois/de la forêt sur les terres faisant l’objet de la transaction, la récolte des arbres actuellement en croissance, la plantation et la récolte de megafoli-paulownia, des palmiers à huile et d’autres feuillus et le développement de l’exploitation du bois ; et l’agriculture », le contrat comprend aussi une clause qui confère à NTD les droits d’exploration, d’extraction et de sous-location48. Depuis 2008, NTD n’a pas activé son bail, et n’a pas fait acte de candidature auprès du Gouvernement du Sud-Soudan pour obtenir un permis, un préalable pour que NTD devienne opérationnelle. Ouganda Christine (nom fictif) et son mari cultivaient assez pour nourrir leurs huit enfants sur les six hectares de terre qu’ils exploitaient depuis plus de 20 ans. En vendant le surplus au marché, ils pouvaient se permettre d’envoyer leurs enfants à l’école. Alors qu’ils vivaient avant dans une maison comptant six pièces, avec cuisine, ils ont maintenant du mal à payer le loyer d’une maison de deux-pièces exigüe, où il n’y a pas assez de terres pour cultiver et produire de la nourriture. Souvent, les enfants de Christine ne mangent qu’une fois par jour et ils ne sont plus scolarisés, car c’est trop cher. Christine et son mari étaient autrefois autonomes, mais dépendent désormais de la bienveillance de leurs amis et voisins ainsi que du travail occasionnel qu’ils peuvent trouver49. Christine est une personne parmi plus de 20 000 50 qui déclarent avoir été expulsées de leurs maisons et de leurs terres dans le district de Kiboga, et dans le district voisin de Mubende, pour laisser la place aux plantations de l’entreprise britannique New Forests Company (NFC) L’Autorité forestière nationale de l’Ouganda (NFA) a accordé en 2005 à NFC des permis sur les zones de plantations et a autorisé l’évacuation des anciens résidents, qui a eu lieu en février 2010 à Mubende et entre 2006 et juillet 2010 à Kiboga51. La NFA déclare que les habitants étaient des personnes occupant illégalement le territoire de la forêt et que leurs expulsions étaient justifiées52. NFC se présente comme une « entreprise forestière socialement responsable et inspirée par le développement durable ». Elle a fait acte de candidature pour obtenir des crédits carbones pour la compensation du carbone, et elle affirme créer des emplois dans les zones rurales et construire des écoles et des installations de santé dans le cadre d’un programme de développement communautaire53. NFC soutient qu’à Mubende et Kiboga les personnes ont quitté les terres volontairement54 et qu’elle n’est pas responsable des expulsions menées sur des terres pour lesquelles un permis a été délivré. L’entreprise a déclaré à Oxfam que celles-ci « sont exclusivement entre les mains du gouvernement » et que, en tant que titulaire d’un permis, elle dispose de « droits limités et en aucun cas du droit d’expulser qui que ce soit »55. Selon Oxfam, les activités de NFC mettent en évidence la défaillance du système actuel de normes internationales destinées à garantir que les populations ne soient pas affectées par le transfert des droits fonciers à grande échelle. Les conséquences graves des activités sur les villageois locaux, rapportées à Oxfam par ces derniers, sont particulièrement inquiétantes étant donné le fait que les activités de 18 Toutes nos plantations ont été détruites, nous avons perdu la culture de bananes et de manioc. Nous avons tout perdu. Les travailleurs temporaires de l’entreprise nous ont attaqués, ils ont battu et menacé des personnes. Ils ne nous laissent même pas revenir pour chercher les choses que nous avons laissées derrière nous. J’ai été menacée, ils m’ont dit qu’ils allaient me battre si nous ne nous en allions pas. Christine, la quarantaine, ancienne habitante du Village de Kayindiyindi, district de Kiboga. NFC sont soutenues par l’investissement international d’institutions telles que l’organe de la Banque mondiale chargé des opérations avec le secteur privé (SFI), la Banque européenne d’investissement (BEI) et HSBC, qui affirment tous respecter des normes sociales et environnementales de haut niveau. Quant au droit des villageois à utiliser les terres, NFC a suivi la NFA pour décrire les groupes déplacés, dont certains disent avoir passé leurs vies entières sur ces terres, comme « occupants illégaux » ou « intrus »56. L’entreprise déclare que « la majorité des personnes qui s’étaient installées dans les [réserves] l’avait fait de manière illégale » à l’exception de celles qui ont pu apporter la preuve de leur résidence sur ces terres avant 1992. Elle fait référence à un processus d’authentification mené par le gouvernement à Mubende, qui a déterminé que seulement 31 familles pouvaient démontrer un tel droit de propriété. NFC affirme qu’aucune famille à Kiboga n’a pu démontrer des droits sur les terres qu’elles occupaient précédemment57. Pourtant, plus de 20 000 villageois pensent disposer clairement de droits légaux sur les terres qu’ils occupaient, et les deux communautés ont porté l’affaire devant la Haute Cour de l’Ouganda pour protéger leurs droits58. NFC conteste ces plaintes et aucune décision n’a encore été prise sur cette affaire. Les personnes concernées du district de Kiboga indiquent avoir été invités à se déplacer sur ces terres dans les années 1970 par le régime de Idi Amin. Ils ont aussi affirmé que le gouvernement avait reconnu leurs droits de rester sur les terres, leur permettant de construire des écoles et d’établir des structures administratives. De plus, leurs plaintes légales font référence à un décret-loi qui interdit les expulsions, et qui, disent-ils, reste en vigueur59. La plupart des personnes qui vivaient dans la zone de concession de Mubende disent s’être vu allouer des terres dans cette zone en qualité d’anciens combattants de la Seconde Guerre mondiale, après avoir combattu en Égypte et en Birmanie pour les Britanniques, ou leurs descendants. D’autres disent avoir acheté, s’être vu offrir ou avoir hérité de terres pendant les années 1980 et 1990. Dans le cadre de leurs plaintes, les demandeurs déclarent être « de bonne foi, des occupants légaux et/ou des locataires de droit coutumier et être protégés par la constitution de la République de l’Ouganda et par les lois foncières de l’Ouganda »60. Dans ces deux affaires, la Haute Cour a considéré que les problèmes des communautés étaient suffisamment urgents et leurs arguments suffisamment forts61 pour justifier des ordonnances limitant les expulsions en attendant l’exécution des audiences complètes62. Les communautés locales ont déclaré que les expulsions se sont poursuivies après ces ordonnances63. Elles décrivent les expulsions comme un processus tout sauf volontaire et pacifique. Des personnes ont rapporté à Oxfam que l’armée et la police ont été déployées dans la zone pour procéder aux les expulsions et que plusieurs personnes ont été battues pendant ce processus64. Certains villageois disent aussi que des travailleurs temporaires qu’ils croient être employés par NFC se sont joints à la police et à l’armée pour brûler des maisons, détruire des cultures et massacrer du bétail65. Les réclamations inscrites dans la plainte apportée par la communauté de Kiboga affirment que NFC « en prétendant être le concessionnaire de [la NFA] a enfreint les terres des 19 plaignants, a détruit des maisons, des cultures, tué des animaux des plaignants et a essayé d’expulser les plaignants ». Ils invoquent aussi « des violations de propriété, des actes d’incivilité, de harcèlement et de mauvais traitement » commis par NFC et ses agents. Les expulsés de Mubende déclarent que les employés de NFC « expulsaient, détruisaient leurs plantations, démolissaient leurs maisons, les intimidaient et les maltraitaient66. » NFC nie toute implication dans des expulsions ou des actes de violence et déclare : « il n’y a pas eu de cas de blessure, de violence physique ou de destruction de la propriété pendant les processus de départ volontaire ayant été porté à l’attention de NFC67 ». Pour appuyer cette position, NFC rappelle l’existence d’un rapport d’audit du Conseil de soutien de la forêt (FSC), qui fait remarquer ce qui suit : « il n’y a pas eu de cas de blessures ou d’expulsion forcée rapportés au cours du [processus d’évacuation de Mubende]68 ». Toutefois, l’entreprise était consciente de ces allégations et une étude de terrain des activités de NFC à Mubende conduite par la SFI a été menée, entre autres, « pour déterminer s’il existait un fondement aux … références des médias [aux] allégations d’expulsions forcées, de harcèlement et de destruction de la propriété [à Mubende] suite au relogement des résidents locaux par le gouvernement afin que NFC puisse procéder à son activité69 ». NFC a expliqué à Oxfam que ses agents responsables du développement communautaire étaient présents lors de chaque processus de « départ » et qu’ils n’ont pas rapporté de faits de violence ou de dommages de biens70. Dans les pièces fournies par NFC à Oxfam, il apparaît qu’il s’agit bien là de la nature des enquêtes menées par l’entreprise concernant ce problème. NFC nie toute infraction aux ordonnances de la Cour, car « NFC n’était pas responsable d’expulsions » et affirme que les expulsions des réserves forestières sont exclusivement la responsabilité du gouvernement et des autorités compétentes71. NFC a expliqué à Oxfam qu’une « injonction interdisant à NFC d’expulser des populations a peu de valeur si NFC n’est pas responsable en premier lieu de l’expulsion des populations. La Cour avait à juste titre interrompu le processus d’évacuation afin d’enquêter sur la situation ; l’injonction était toutefois émise contre la mauvaise partie72 ». Lors de réunions et d’entretiens avec les communautés, les villageois ont expliqué à Oxfam qu’aucun d’entre eux, et personne parmi ceux qu’ils connaissaient et qui avaient perdu leur maison ou leurs moyens de subsistance n’avait reçu de compensation ou d’autres terres à cette date73. Certains affirment que les autorités locales ont proposé des indemnisations, mais que ces dernières n’ont jamais abouti74. Oxfam a compris qu’à Kiboga, une proposition a été faite pour octroyer d’autres terres, pour une période de cinq ans. Les communautés déclarent avoir rejeté cette offre, car elle ne fournissait pas suffisamment d’espace et une solution qui n’était que temporaire75. NFC reconnaît que l’absence d’indemnisation « est une grande source de préoccupation pour NFC à la fois en termes d’atténuation des risques et d’éthique ». L’entreprise a dit à Oxfam qu’elle se proposait de faire partie du processus d’indemnisation, mais que la NFA le lui avait 20 Nous gagnons 31 000 roupies (3,50 de dollars) par jour. Si vous savez qu’un poulet coûte 40 000 roupies, il est facile de comprendre que nous ne consommons pas assez de protéines. Même le riz est cher pour nous, de temps alors qu’avant c’était nous qui cultivions l’huile de palme. Avant l’exploitation des palmiers à huile, certains de nos enfants allaient même à l’université; de nos jours il est très difficile de leur permettre de [terminer] l’école primaire. Agriculteur de Tayan Hulu, en Indonésie. interdit : « nous appuyons fermement l’indemnisation et croyons que ceci est non seulement juste, mais aussi qu’il s’agit de la manière la plus rapide de trouver une solution mutuellement bénéfique. Toutefois, en qualité de titulaire de la licence, il nous est expressément interdit d’offrir une indemnisation à quiconque se trouvant sur les terres du gouvernement76 ». De plus, l’entreprise affirme avoir fait pression sur le gouvernement pour indemniser les expulsés éligibles de « la valeur de leurs cultures et des terres perdues et autres terres77. » Toutefois, NFC a aussi révélé à Oxfam qu’elle considère que l’indemnisation n’est due que pour ceux qui peuvent prouver leurs droits sur les terres78. En partant de ce principe, seules 31 familles recevraient une compensation pour la perte de leurs moyens de subsistance. Oxfam considère que l’approche légale adoptée par NFC en réponse aux ordonnances de la Cour et sur la question de l’indemnisation n’est pas pertinente pour une entreprise éthique, en particulier compte tenu des normes internationales auxquelles l’entreprise affirme adhérer. NFC et ses investisseurs comptent beaucoup sur deux appuis indépendants de la plantation de Mubende pour démontrer que l’entreprise s’est correctement déchargée de ses responsabilités liées aux expulsions et relatives à la provision d’une indemnisation : le certificat du FSC et une enquête de terrain de la SFI (aucun des deux ne s’occupant de la situation à Kiboga). Oxfam s’inquiète de la rigueur de ces évaluations externes et du niveau de compensation qu’elles fournissent. Ainsi, l’enquête de la SFI fait remarquer que NFC « n’a pas été en mesure d’appliquer complètement ses principes pour guider la réinstallation et que « seul un audit complet de la réinstallation [qui n’a pas été mené à ce jour] peut fournir des preuves suffisantes pour que la SFI puisse rejeter les allégations [d’expulsion forcée, de harcèlement et de destruction des biens à Mubende] ». En outre, ce rapport ne précise pas clairement dans quelle mesure la SFI s’est appliquée à mettre en place des rencontres avec les communautés locales et atteindre ainsi son objectif79. Selon Oxfam, cette évaluation n’offre donc pas les garanties suffisantes indiquant que les normes éthiques les plus élevées auxquelles NFC affirme adhérer sont respectées. Indonésie L’expansion rapide de la production d’huile de palme dans le monde entier a conduit à des centaines de conflits fonciers avec les communautés locales, car leur sécurité alimentaire et leur accès aux ressources naturelles sont menacés par les plantations de palmiers à huile. L’Amérique latine et l’Afrique de l’Ouest sont les nouvelles frontières des palmiers à huile, mais de nombreux conflits fonciers demeurent en suspens en Indonésie, qui avec la Malaisie, produit environ 85 % de l’huile de palme au monde. L’ONG indonésienne Sawit Watch, suit actuellement 663 conflits fonciers - un nombre effrayant80. L’un d’entre eux implique les communautés autochtones Dayak de la région de Sanggau, dans le Kalimantan occidental. Dans les 11 villages de la région de Tayan Hulu, le conflit a été latent pendant les 15 dernières années. Au milieu des années 90, une société mixte malaisienne/indonésienne nommée PT MAS est venue négocier 21 Nous gagnons 31 000 roupies (3,50 dollars) par jour. Si vous savez qu'un poulet coûte 40 000 roupies, il est facile de comprendre que nous ne consommons pas assez de protéines. Même le riz est maintenant cher pour nous, alors qu'avant c'était nous qui cultivions l'huile de palme. Avant l'exploitation des palmiers à huile, certains de nos enfants allaient même à l'université ; de nos jours il est très difficile de leur permettre de [terminer] l'école primaire. Agriculteur de Tayan Hulu, en avec les représentants des communautés locales pour convertir leurs terres en plantations de palmiers à huile. L’entreprise, approuvée par le Bupati (chef de région), a remis des « lettres de libération », pour que les villageois cèdent leurs terres à la société par le biais d’un bail de 35 ans. En retour l’entreprise a promis de construire des maisons, des écoles, une clinique, et des réseaux d’eau. Chaque famille a cédé plus de 7,5 hectares, dont 5,5 serait destiné à leur l’exploitation par l’entreprise, et deux hectares plantés seraient restitués à la famille pour la culture de palmiers à huile81. PT MAS affirme que la zone restituée sous forme de portions de terres destinées aux petits exploitants de palmiers à huile s’élève actuellement à 27 % de la superficie totale des terres82. Une étude d’Oxfam montre que 15 ans plus tard, la plupart des familles ont reçu en moyenne seulement 1,2 hectare, surface qui ne suffit pas à récolter suffisamment de fruits pour leur survie. PT MAS avance également avoir construit des installations pour les travailleurs83, et ajoute que depuis que l’entreprise a acquis le terrain, la communauté a été intégrée au flux des activités de développement économique et social. Pourtant, selon les communautés, la plupart des installations initialement promises ne se sont pas concrétisées. Par ailleurs, tandis que les « lettres de libération » mentionnaient le droit de louer les terres, les communautés de Tayan Hulu ont appris depuis qu’à la fin de la période de bail de 35 ans, les terres reviendront à l’État, qui à son tour pourra étendre le bail en faveur de la société jusqu’à 95 ans, sans avoir à consulter ou obtenir le consentement des personnes concernées. Bien que dans un cas, les villageois ont utilisé avec succès le droit coutumier pour imposer une amende à la société pour avoir omis de négocier avec les villageois avant d’accéder à la terre en général, les griefs des communautés sur la façon dont les terres leur ont été prises n’ont jamais été résolus, que ce soit par l’entreprise ou par le gouvernement, ce qui conduit à des protestations, des blocus, des arrestations, et des actions d’oppression. Sawit Watch a noté que pour les gens de Tayan Hulu, ces événements sont apparus comme un choc pour leurs cultures, leurs modes de vie et les systèmes coutumiers de gestion foncière. Des débats houleux se sont tenus sur les opportunités, les coûts et leur compensation et ceci a conduit à des divisions entre les communautés locales, et avec les gouvernements régionaux et sous régionaux et enfin l’entreprise. En 2007, les représentants de la communauté ont demandé à l’entreprise de traiter ces problèmes. En l’absence de réponse, la population a bloqué la route de la plantation et a manifesté à l’extérieur des locaux de l’entreprise, demandant à ce que plus de terres soient redistribuées. Cinq membres du syndicat local des petits propriétaires ont été arrêtés et accusés d’agression et de destruction de biens d’autrui. L’entreprise a fait diverses offres pour résoudre ce litige, mais n’a pas accepté de respecter les termes de l’accord d’origine en reconnaissant la réclamation des communautés concernant les terres84. PT MAS a maintenant des projets de développement, ce qui fait émerger de nouvelles tensions85. 22 PT MAS est une filiale d’un géant malaisien spécialisé dans l’huile de palme, Sime Darby, qui assure 6 % de la production mondiale d’huile de palme. Sime Darby affirme contrôler la chaîne d’approvisionnement « de la ferme alimentaire jusqu’à la mise à disposition des aliments sur la table », non seulement en faisant pousser des palmiers à huile, mais aussi en assurant le traitement, le raffinage et la vente des produits de consommation tels que de l’huile de cuisson86. Sime Darby indique que PT MAS a respecté le droit et les règles indonésiennes et que l’acquisition des terres a été menée avec une compensation lorsque cela était pertinent87. Toutefois, en qualité de membre du Conseil exécutif de la Table ronde pour une huile de palme durable (RSPO), l’entreprise devrait veiller à ce que les plans de développement de l’une de ses filiales suivent la procédure de consentement libre, informé et préalable, chose qu’elle n’a pas faite88, et développer des programmes clairs pour résoudre les anciens conflits portant sur les droits fonciers. En Amérique latine, un continent connaissant historiquement une répartition extrêmement inégale des terres, des revenus, et du pouvoir, et où règnent de violents conflits fonciers, l’expansion de la canne à sucre et de l’huile de palme pour la production d’agrocarburants est associée à l’accaparement de terres brutal et à des actes de violence. Alors que la Colombie est généralement connue pour son grand secteur d’exploitation de l’huile de palme et pour les problèmes qui y sont liés89, la tendance s’étend à d’autres pays, notamment le Honduras et le Guatemala. Je travaillais jusqu’à huit heures par jour à récolter les fruits du palmier à huile. Si je n’avais pas réalisé mes objectifs, je devais rester davantage de temps. C’était un travail très dur. Il faisait très chaud et ils nous accordaient seulement 15 minutes pour manger et boire de l’eau. Après cela, nous ne pouvions boire que de l’eau stagnante des flaques. Nous ne pouvions prétendre à aucune sécurité sociale. Nous ne pouvions pas mettre en place un syndicat ou demander une augmentation de salaire parce qu’ils nous auraient jetés immédiatement dehors. Ils nous ont vendu l’idée que cette monoculture allait garantir à tous un travail et une vie meilleure. Pourtant, elle n’a apporté que chômage et pauvreté. Daniel Santos, ancien travailleur d’Exportadora del Atlántico, au Honduras.90 Honduras Pendant une courte période à la moitié des années 70, la Vallée Bajo Aguán, une des régions les plus fertiles du Honduras, était connue comme la “capitale de la réforme des politiques foncières”. L’essentiel des terres de la vallée, occupé par la forêt vierge, était à la disposition de 54 coopératives de petits exploitants d’autres régions du pays. Même après la Loi de 1992 relative à la modernisation agricole, qui était généralement perçue comme une contre réforme, la nouvelle loi a autorisé le fait que les terres ne soient vendues qu’aux exploitants ou aux coopératives qui auraient été éligibles pour devenir bénéficiaires de la réforme des politiques foncières en premier lieu. Cependant, au cours de la décennie qui a suivi, des dirigeants de coopératives corrompus en coalition avec des entreprises mal intentionnées ont contourné la législation en combinant tromperie, chantage et violence, vendant la plupart des terres des coopératives à de puissants propriétaires terriens. Les exploitants se sont retrouvés ouvriers agricoles sur de grandes plantations, travaillant dur pour un petit salaire91. En 2001, certains des exploitants se sont organisés dans la cadre du Mouvement unifié des paysans de la vallée de Aguán (connu sous son acronyme espagnol : MUCA92), dans le but de récupérer leurs droits fonciers, d’abord par l’intermédiaire des tribunaux. Les voies légales épuisées, ils ont commencé en 2006 à occuper des terres. En juin 2009, ils ont même occupé l’une des usines de transformation de palme de l’entreprise Exportadora del Atlántico, qui fait partie de Grupo Dinant, provoquant ainsi le président Manuel Zelaya pour l’inciter à 23 promettre d’enquêter sur la question des droits fonciers. Toutefois, M. Zelaya s’est vu ôter le pouvoir par un coup d’État, plus tard au cours de ce même mois. Par la suite, à compter d’octobre 2010, 36 petits paysans ont été tués. Aucune de ces affaires n’a été résolue ou traduite en justice93. Suite à l’escalade de violence et aux meurtres de petits exploitants, le gouvernement a militarisé la zone. La principale contrainte pour le développement est le régime foncier inéquitable et la pression énorme sur [la terre]. L’existence de vastes zones de terres au sein de grandes propriétés avec peu d’investissements en capital, ou de grandes extensions de terres en friche sont les principales contraintes à l’accès à la terre et une cause majeure de retard social sur le terrain. Coordination nationale des Organisations paysannes, CNOC.94 Dinant produit de l’huile de cuisine, des collations et d’autres denrées alimentaires, et essaie maintenant de s’implanter sur le marché des agrocarburants. Pour ce faire, l’entreprise a souscrit un prêt de 30 millions de dollars auprès de la SFI et un prêt de 7 millions de dollars de la Société interaméricaine d’investissement (SII)95. En avril 2011, après les interventions des groupes internationaux de défense des droits de l’homme comme FoodFirst Information et Action Network (FIAN), deux autres grands bailleurs de fonds d’investissement ont résilié leurs contrats avec Dinant : L’entreprise française EDF Trading a annulé son contrat d’achat de crédits carbone de cette entreprise, indiquant qu’ils « prenaient la situation au Honduras très au sérieux »96 et la banque allemande DEG a annulé un investissement de 20 millions de dollars en 2011, « compte tenu de l’évolution des conflits agraires dans la région du Bajo Aguán »97. Le gouvernement a finalement été contraint de convoquer les deux MUCA et l’entreprise a été forcée de négocier un accord, ce qu’ils ont fait en juin 2011. Le gouvernement a accepté de distribuer 11 000 hectares aux exploitants, notamment 4 000 hectares où des palmiers à huile ont été plantés par Exportadora del Atlántico. L’entreprise a accepté la proposition, mais a ensuite souhaité de la renégocier. Toutefois, en vertu de cet accord, les exploitants doivent racheter les terres faisant l’objet du litige au prix du marché. Par ailleurs, de nombreux autres groupes de paysans dans la vallée sont toujours à la recherche de solutions à leurs problèmes, et poursuivent l’occupation des terres, s’exposant de ce fait à des expulsions violentes de la part des forces de sécurité de l’État98. Les organisations d’exploitants proposent désormais une Loi de réforme des politiques foncières intégrée, qui si elle est approuvée, contribuera de façon significative à apporter une solution à long terme au problème de la structure de la propriété agricole excessivement concentrée entre les mains de quelques-uns, au détriment de centaines de milliers de petits exploitants qui n’ont pas accès aux terres dont ils ont besoin pour s’assurer une vie décente et pour pourvoir aux besoins de leurs familles. De toute évidence, ce sont les intérêts de l’entreprise pour développer le projet d’agrocarburants qui prévalent, plutôt que les familles paysannes Q’eqchi qui vivent dans la région. Daniel Pascual, Comité de Unidad Campesina99. Guatemala Le Guatemala a été reconnu internationalement comme une région adéquate pour la production d’agrocarburants, tant pour l’éthanol (canne à sucre) que pour le biodiésel (huile de palme). Cela a donné naissance à une nouvelle vague de spoliation de terres, en ciblant les terres restantes appartenant aux populations autochtones et aux paysans. La surface plantée de canne à sucre au Guatemala est passée de 3,4 % de la surface agricole totale en 1980, à 14 % en 2008100. De même, la surface dédiée à l’huile de palme est passée de 24 35.000 au chiffre estimé de 100 000 hectares en 2010101. Les domaines jugés appropriés pour la conversion à la canne à sucre et à l’huile de palme sont aussi ceux où le Secrétariat des affaires agraires a enregistré les taux les plus élevés de conflits liés au foncier102. La région de la vallée du Polochic dans le nord-ouest du pays est l’un des domaines ciblés pour l’expansion de la culture de la canne à sucre. En 2005, la famille Widmann a déplacé sa raffinerie de canne à sucre de la côte sud de la vallée du Polochic, en la renommant Chawil Utz’aj (bonne canne dans la langue locale Q’eqchi), en utilisant un prêt de 26 millions de dollars de la Banque centrale américaine d’intégration économique (BCIE)103. En 2008, Chawil Utz’aj avait planté 5.000 hectares de canne à sucre. Les exploitants eux-mêmes n’ont pas eu d’autre choix que de chercher refuge dans les terres escarpées et infertiles de la Sierra de las Minas. Selon la presse, en 2010, Chawil Utz’aj avait du mal à rembourser le prêt. Les terres de l’usine étaient mises aux enchères publiques104. Les familles agricoles qui ont dû quitter la vallée, quelques années auparavant ont décidé d’y retourner à la fin 2010 pour occuper les terres pour la production de denrées alimentaires. Toutefois, comme l’a fait remarquer une mission de droits de l’homme de la Chaire de l’UNESCO de l’Université de Catalogne, en mars 2011, des unités de sécurité privée ont expulsé plus de 800 familles de 14 collectivités de la vallée du Polochic105. L’inverse du développement Dans les exemples présentés plus haut, des milliers de personnes ont été convaincues de se séparer de leurs terres sur la base de fausses promesses (en Indonésie), ont été expulsées de leurs terres et de leurs maisons (en Ouganda, au Guatemala et en Honduras), ou pourraient faire face à l’expulsion, si les projets se déroulent selon les prévisions (au Sud-Soudan). Les études de cas donnent une bien triste image de ce qui arrive ensuite, après la perte de leurs terres et moyens de subsistance pour les personnes concernées. Les villageois dans la région indonésienne de la Tayan Hulu, qui ont accepté la cession de leurs terres en signant avec PT MAS, ne peuvent pas récolter les fruits suffisants pour vivre de la terre qu’ils ont reçue en retour. Certains petits propriétaires désespérés ont volé des fruits sur les terres des plantations de l’entreprise afin de gagner suffisamment pour nourrir leurs familles. Ils ont été pris et emprisonnés. Les villageois des concessions de NFC à Kibga et Mubende en Ouganda qui ont parlé à Oxfam disent qu’ils ont bien moins de nourriture aujourd’hui, la plupart des familles sont passées de trois à un ou deux repas par jour. Elles mangent également des aliments moins variés et moins nutritifs, avec une dépendance excessive au maïs, et ne consomment presque pas de viande. Les enfants sont plus vulnérables face aux maladies car ils souffrent de malnutrition. La plupart affirment avoir été expulsés de villages bien établis et certains de ceux à qui Oxfam a parlé ont laissé derrière eux des maisons qu’ils 25 habitaient depuis plus de trente ans. Tous ceux qui ont parlé à Oxfam louent désormais des maisons plus petites ou ont construit des structures fragiles et temporaires constituées de polyéthylène ou de paille et de bois. Peu d’entre eux peuvent désormais payer les frais scolaires ou un traitement médical. NFC affirme que dans certains cas « d’anciens occupants illégaux qui se sont installés hors des limites de la réserve bénéficient de divers projets encourageant l’éducation, la santé et les moyens de subsistance mis en œuvre par NFC, les communautés et le gouvernement local106 », mais aucune des personnes expulsées auxquelles Oxfam a parlé n’a dit avoir bénéficié du travail de développement de NFC107. NFC concède qu’il est difficile de suivre les expulsés et de s’assurer si ils bénéficient, et de quelle manière, des initiatives de l’entreprise 108. Une menace pour les communautés Les nouvelles transactions foncières déstabilisent souvent les communautés, car elles restreignent le partage des terres communales et créent des divisions. C’est ce qui s’est passé au Tayan Hulu (et au sein d’autres communautés Dayak en Indonésie), où le développement de la plantation de palmiers à huile a creusé un fossé entre la communauté et ses chefs traditionnels. En Ouganda, les personnes expulsées de leurs terres ont afflué vers d’autres villages qui entourent les concessions de Mubende et de Kiboga, bouleversant l’équilibre démographique de la région. L’afflux est susceptible d’avoir un effet sur la capacité (déjà limitée) des écoles, des établissements de santé et autres infrastructures. Le village de Kisiita, près de la concession de Mubende, et le village de Kayindiyindi, près de la concession de Kiboga, par exemple, ont tous deux presque doublé de taille lorsque les personnes expulsées ont été contraints de s’y déplacer. En conséquence, NFC rappelle son travail de développement d’infrastructures, en particulier les fonds pour les écoles et les centres de santé, et qui, dit-elle ont été répartis de façon égale109. Aucun des expulsés auxquels Oxfam a parlé ne dit avoir bénéficié du travail de développement communautaire de NFC110. Les conséquences pour les collectivités locales décrites dans ce chapitre sont très problématiques. Dans les chapitres qui suivent, nous nous intéresserons au contexte réglementaire au niveau national et international, qui peut transformer l’investissement agricole très convoité en un cauchemar pour ceux qui sont concernés. 26 3 Dysfonctionnements à l’échelon national Les communautés attendent de l’État qu’il s’assure que les investissements sont réalisés dans leur intérêt et qu’il les protège contre les pratiques abusives. Cette partie étudie les raisons pour lesquelles les gouvernements permettent l’accaparement des terres. Droits sans pouvoirs Les opportunités induisent souvent des risques, mais quand les gens ont peu de pouvoir, les risques l’emportent généralement sur les avantages potentiels. Le Rapporteur spécial des Nations Unies sur le droit à l’alimentation, Olivier de Schutter, a noté que les conventions des droits de l’homme contenaient des dispositions claires en ce qui concerne la négociation de transactions foncières à grande échelle. Un principe important est que, « [e]n général, tout changement dans l’utilisation des terres ne peut avoir lieu qu’avec le consentement libre, informé et préalable des communautés locales concernées »111. Le respect du consentement libre, informé et préalable est essentiel à la bonne gouvernance et est essentiel pour la réduction de la pauvreté112. Les gouvernements locaux doivent s’assurer que ce principe est respecté. Dans les négociations sur l’utilisation des terres, cela implique de s’assurer que les bons titulaires participent aux négociations et qu’ils sont informés et habilités par les lois et les institutions, afin qu’ils puissent tirer le meilleur parti de chaque opportunité. Le fait de gagner dès le début le consentement des peuples indigènes et des autres communautés affectées permet d’établir des relations positives et de prévenir les projets en proie à des conflits, ou encore la perte de bénéfices pour les entreprises, et la perte de revenus pour les gouvernements. Absence de consultation Dans la pratique, les gouvernements manquent souvent de s’assurer que les détenteurs de droits affectés sont à la table des négociations, et ne se préoccupent jamais de leur donner les moyens d’être de véritables acteurs. Trop souvent, c’est le gouvernement : le président, le gouverneur provincial, le maire ou le chef - qui négocie avec un mandat contesté du peuple dont les droits fonciers sont en jeu. Lorsque des collectivités locales sont consultées, les consultations ont tendance à être biaisées en ce qui concerne la participation équitable des femmes, même les droits d’usage (primaire et secondaire) des femmes 27 sont fortement affectés. Cette situation est due au fait que les femmes n’ont souvent pas de droits de propriété foncière formels113. Dans chacun des cas présentés dans ce document d’information, les négociations n’étaient ni menées, ni même mandatées par les détenteurs des droits fonciers, mais par les chefs locaux et/ou les autorités gouvernementales locales et nationales. En Ouganda, la NFA a accordé des licences pour s’installer dans les districts de Mubende et de Kiboga et, bien que les droits des communautés sur les terres fassent toujours l’objet d’un litige, elle a sanctionné l’expulsion forcée de plus de 20 000 personnes. Dans son rapport de durabilité pour la période de 2009 à 2010, NFC décrit, à Mubende, un « processus de médiation impliquant le gouvernement national, le gouvernement local, les dirigeants de la communauté et la population », en conséquence de quoi, « le problème a été résolu de manière pacifique avec une réinstallation volontaire », et le rapport de faire également remarquer qu’à Kiboga, l’équipe en charge de la RSE s’est engagée dans une campagne agressive de sensibilisation auprès du gouvernement et des habitants de la réserve. Les occupants coopèrent et ont volontairement quitté la réserve114. Toutefois, les études d’Oxfam ont révélé des témoignages cohérents de villageois des deux districts n’ayant pas été consultés et qui n’avaient pas consenti à céder leurs terres, leurs maisons et leurs moyens de subsistance115. Elles disent que les réunions publiques, impliquant les représentants du gouvernement, ont été convenues, mais qu’elles n’étaient pas consultatives et ont simplement servi à informer sur les échéances pour l’évacuation des terres. Cela ne semble pas entrer en contradiction avec la position de NFC. Dans une lettre à Oxfam, NFC décrit une série de « consultations » ayant eu lieu dans les mois qui ont précédé les « départs » qui mettaient clairement en évidence les conditions dans lesquelles les évacuations se sont déroulées, les lois concernant l’usage de terres des réserves forestières centrales et les échéances116. En août 2008, les représentants de NFC et du district de Kiboga se sont rencontrés pour rediscuter de la réinstallation des personnes expulsées. Le compte-rendu de la réunion montre qu’aucune communauté n’était représentée et indique qu’une proposition pour allouer un maximum de deux miles carrés pour la réinstallation, pour une période de cinq ans a été convenue entre les parties. NFC a accepté de financer une étude pour déterminer de façon précise quelle surface de terres serait nécessaire. Tant NFC que les villageois de Kiboga ont raconté à Oxfam que l’étude a bien été effectuée, mais que ses conclusions finales n’ont jamais été communiquées117. Un dirigeant de la communauté a expliqué que la proposition avait été présentée à la communauté lors d’une réunion publique (qui n’était pas consultative), mais que celle-ci était inacceptable, car trop peu de terres étaient offertes et la solution était temporaire118. Dans le cas de NTD au Sud-Soudan, la « coopérative » (plutôt que NTD elle-même) a obtenu de l’État (CES) le bail d’exploitation de 600 000 hectares de terres communautaires, dans un contexte où manquait un système juridique national unifié de traitement des 28 demandes d’acquisition de terres par des investisseurs étrangers. Avant 2009, les acquisitions foncières ont été administrées par une combinaison du droit foncier (nord) soudanais, qui a été appliqué de façon irrégulière parallèlement au droit foncier coutumier : la terre était gérée selon des procédures ad hoc, contribuant à un manque de transparence. Le droit foncier coutumier, au moment de l’affaire ATN, était le cadre le plus stable dans le temps et le cadre juridique légitime pour la gestion des terres au Sud-Soudan119. Avant 2009, les vides juridiques rendaient plus facile l’acquisition de terres à grande échelle avec moins ou même sans consultation. Bien que la réponse de l’entreprise ait été que « l’intention de NTD a été claire dès le départ - la terre devait être exploitée avec la pleine coopération et en consultation avec les communautés et que celles-ci devraient se sentir propriétaires de cette terre », aucune consultation communautaire n’a eu lieu avant que l’accord ne soit signé. Seules trois personnes, les membres signataires de la « Coopérative », dont le chef suprême, semblent avoir pris place à la table des négociations quand l’accord a été signé en 2008. Aucune information n’a été communiquée à la communauté, qui a été écartée du processus décisionnel120. Selon les membres de la communauté, la société ne les a rencontrés qu’en novembre 2010. La loi foncière de 2009 du Sud Soudan, adoptée après la date de l’accord formé entre NTD et la Coopérative, a fait de la consultation des collectivités et du consentement informé, des obligations légales préalables à tout investissement. Seul le cas de l’Indonésie atteste d’une consultation avec les détenteurs de droits fonciers. Mais celle-ci respectait à peine le principe de consentement libre, informé et préalable : beaucoup d’exploitants qui ont cédé leurs terres se sont sentis floués en signant une lettre qui s’est avérée avoir des implications négatives plus lourdes. Absence d’information L’exemple indonésien illustre l’importance du fait que les titulaires de droits aient accès à des informations exactes et actualisées. L’information est synonyme de pouvoir, en particulier dans le cadre des négociations. Malgré les engagements pris concernant le respect du principe du consentement libre, informé et préalable par certains acteurs du secteur privé et du secteur public, il est difficile pour les chercheurs - et a fortiori pour les communautés locales - d’obtenir des informations les plus élémentaires concernant les offres négociées, ou encore au sujet de celles en cours de négociation. L’IIED n’a découvert que douze contrats pour son analyse des transactions foncières121. Parmi ces derniers, ils ont constaté que « certains contrats à la base de la récente vague d’acquisitions foncières pourraient ne pas être adaptés à l’objet déclaré. Un certain nombre de contrats analysés semblent être des documents brefs, non spécifiques qui accordent les droits à long terme sur de vastes zones de terre, et dans certains cas des droits prioritaires sur l’eau, en échange de recettes publiques apparemment réduites et/ou de promesses apparemment peu précises d’investissement et 29 de/ou de création d’emplois122. » Le manque de transparence compromet également l’information du public et peut ouvrir la porte à la corruption. Les informations relatives aux acquisitions de terres à grande échelle sont souvent entourées de secret, en particulier lorsqu’elles se font vraiment à grande échelle, ce qui semble être négocié à très haut niveau. Esther Obaikol, Directrice exécutive, Uganda Land Alliance. Le Liberia a résisté à la tendance quand le pays a récemment renégocié les contrats des investisseurs ; ces derniers ont été ensuite ratifiés par le parlement et sont disponibles en ligne. Selon l’IIED, cette initiative a eu lieu grâce à « un leadership politique déterminé, une équipe de négociation forte issue du gouvernement et un soutien juridique d’envergure mondiale. » Les contrats ont été significativement améliorés en termes d’engagements des investisseurs en matière d’emploi, de formation, de transformation locale et d’achats locaux. La sécurité alimentaire, les garanties sociales et environnementales font l’objet d’une attention particulière123. Encadré 4 : Une norme unique pour renforcer les droits fonciers partout dans le monde ? Les États membres des Nations Unies sont dans la phase finale pour discuter sur un ensemble de « directives volontaires pour la gouvernance responsable de la tenure des terres, des pêches et des forêts ». Premier instrument international consacré à la propriété foncière, ces directives vont énoncer des lignes directrices sur la façon dont les États doivent traiter les questions telles que la redistribution des terres, les investissements étrangers et l’accès des femmes à la terre. On s’attend à ce que ces lignes directrices fournissent une référence applicable, que les gouvernements nationaux pourront être tenus d’appliquer. Des actions complémentaires ont aussi émergé au niveau régional. La plus importante d’entre elles est le Cadre et les Lignes directrices sur la politique foncière en Afrique, entérinés par le Sommet de l’Union africaine en juillet 2009, qui a obtenu un important soutien politique de la part des gouvernements africains et de la société civile. Sources : Organisation pour l’alimentation et l’agriculture de l’ONU (FAO), « Régimes fonciers : directives volontaires », http://www.fao.org/nr/tenure/voluntary-guidelines/fr/ (dernière consultation en juillet 2011) ; Union africaine (UA), Banque africaine de développement (BAD), Commission économique pour l’Afrique (CEA) (2011) et Cadre et Lignes directrices sur la politique foncière en Afrique. « Land Policy in Africa: A Framework to Strengthen Land Rights, Enhance Productivity and Secure Livelihoods », Addis-Abeba: UA/BAD/CEA, http://www.au.int/en/dp/rea/content/framework-and-guidelines-land-policy-africa (dernière consultation en juillet 2011) Toute terre dont la valeur augmente est retirée des mains des pauvres. Fernando Eguren, CEPES, Pérou. Absence de protection Tous les pays ont des systèmes réglementaires et juridiques précisant les droits de propriété et les droits d’accès et d’usage des terres. Souvent, les communautés disposent de leurs propres systèmes de propriété et de régimes fonciers antérieurs aux systèmes nationaux. Ces systèmes sont souvent enracinés dans leur culture, ils existent en dehors de la portée du système national et diffèrent d’une partie à l’autre du même pays. Dans de nombreux pays, un système hybride complexe de droit coutumier et de droit statutaire est apparu. Parfois, les pays ont traduit les aspects du droit coutumier dans le droit formel, mais cela ne signifie pas nécessairement que ces lois sont appliquées. 30 Encadré 5 : Pérou : Gouvernements et entreprises cherchent à tirer profit des ressources du bassin amazonien Au cours des 20 dernières années, l’Amazonie péruvienne a connu un afflux de nouveaux investissements, facilité par les privilèges accordés par l’État aux investisseurs nationaux et étrangers et, démantelant simultanément des lois qui servaient à protéger les droits collectifs. Débutant en 1992 sous la présidence d’Alberto Fujimori, cette vague d’investissements s’est poursuivie au gré des gouvernements successifs, avec l’exploitation des champs de gaz de Camisea, la loi de 2003 relative à la promotion des agrocarburants, ainsi que l’Initiative régionale sud-américaine pour 124 l’intégration des infrastructures IIRSA qui implique la construction de grands barrages hydroélectriques et de diverses routes reliant la côte Pacifique au Brésil. Cette tendance à l’ouverture de la région de l’Amazonie péruvienne à l’investissement privé a atteint son zénith de polarisation sous l’administration 2006-2011, et a provoqué de violents conflits. En 2007, lors d’un acte inhabituel, le président García s’est adressé à l’opinion publique à travers une colonne de journal intitulé « Le syndrome de 125 chien du jardinier » , dans lequel il a précisé que les ressources de l’Amazonie ne sont pas exploitées en raison de communautés rurales qui détiennent des droits collectifs à la propriété et à l’accès aux ressources. En conséquence, déclara-t-il, la nation renonce aux bénéfices potentiels de telles richesses naturelles. Par ailleurs, il a déclaré que les communautés amazoniennes n’autorisent pas l’investissement privé d’entreprise dans l’exploitation des ressources, puisqu’elles sont protégées par des lois qui garantissent certains droits collectifs. Le président a donc conclu que les niveaux élevés de pauvreté dans les communautés amazoniennes sont le résultat combiné d’une législation « obsolète » et des communautés ellesmêmes, qu’il décrit comme « inactives » et « indolentes ». Cette dernière déclaration renvoyait à la métaphore utilisée dans le titre de l’article : le chien du jardinier ne mange pas de fruits, mais ne permet pas à d’autres d’accéder à ces fruits. Cette analyse polémique a été suivie en juin 2008 par un ensemble de 101 décrets législatifs, dont la majorité visait l’abandon des droits collectifs et faisait la promotion de nouvelles facilités destinées aux investisseurs privés pour accéder à la terre et aux ressources situées dans la région amazonienne. Les protestations émanant de la Communauté contre ces décrets ont dégénéré en juin 2009 avec une confrontation violente dans la ville de Bagua dans le Nord amazonien, avec le décès de dizaines de personnes autochtones et de représentants de la loi. Conséquence de la politique du gouvernement décrite ci-dessus : il y a aujourd’hui plus de 50 mégaprojets énergétiques ; de concessions pétrolières et gazières couvrant 70 % de l’Amazonie péruvienne ; plus de dix millions d’hectares de concessions minières ont été octroyés, et près de huit millions d’hectares de forêt sont en concession pour l’exploitation du bois. Dans le contexte de cette ruée vers les terres, l’agence gouvernementale Pro-inversión a annoncé des plans pour mettre en œuvre la production des cultures destinées à la fabrication d’agrocarburants sur un demi-million d’hectares. Dans la plupart des cas, cette ruée pour l’exploitation ses ressources se déroule dans le dos des citoyens du Pérou, avec un manque notable de transparence dans les procédures juridiques et administratives, et elle est fondée sur des évaluations d’impact social et environnemental comportant des carences. En conséquence, la biodiversité amazonienne est menacée, l’insécurité alimentaire des populations rurales et autochtones augmente considérablement, et les communautés craignent d’être déplacées. 31 En contraste avec ces tendances, le gouvernement nouvellement élu du président Humala a approuvé une nouvelle loi, au cours de son premier mois en fonction. Celle-ci entend assurer le consentement libre, informé et préalable des communautés affectées par l’exploitation des ressources naturelles dont elles dépendent. À condition qu’elle implique une réglementation plus stricte sur les impacts environnementaux et sociaux conforme aux normes internationales, et en supposant que cela conduira à la modification d’autres lois - y compris celles qui régissent les investissements fonciers - qui ignorent actuellement l’application du principe de consentement libre, informé et préalable, cette nouvelle loi pourrait contribuer à renverser des décennies d’impacts sociaux néfastes découlant de la ruée vers les ressources en Amazonie péruvienne. Le rapporteur a été informé de plusieurs cas d’expulsions [au Guatemala] où l’identité du propriétaire du terrain n’avait pas été correctement vérifiée ou lorsque les limites des terres en question (finca [propriété]) n’avaient pas été délimitées de manière précise. Plusieurs témoignages soulignent la participation de travailleurs de la finca aux expulsions, bien qu’elles soient illégales. Alors que le gouvernement a fait preuve d’ouverture dans la résolution de certaines affaires par le biais de forums de dialogue (mesas de dialogo), le Rapporteur spécial note que trop souvent, les riches propriétaires terriens sont mieux soutenus par l’appareil d’État que les paysans (campesinos). Rapport du Rapporteur spécial sur le droit à l’alimentation, Olivier de Schutter, Mission au Guatemala126. Les nouvelles pressions mondiales sur la terre ont augmenté la tension exercée sur la fragile combinaison de systèmes juridiques en place dans de nombreux pays. En pratique, les investisseurs tendent souvent à exploiter la confusion créée par le chevauchement des systèmes pour échapper aux exigences de chaque système ou en les trompant en s’alignant avec le gouvernement ou un chef de droit coutumier. Les droits fonciers reconnus sont aussi forts que les institutions qui les défendent. L’expulsion des villageois des plantations de NFC en Ouganda est un cas d’école. Les communautés pensent qu’elles détiennent des droits formels sur les terres sur lesquelles elles vivaient et dont elles retiraient leurs moyens de subsistance, et font confiance au système légal pour protéger ces droits. Par la suite, la Haute Cour ougandaise a accordé des ordonnances provisoires interdisant les expulsions dans les deux districts de Kiboga et Mubende127. Pourtant, les expulsions se sont poursuivies, et les personnes expulsées ont déclaré que l’armée et la police ont été envoyées avec des ouvriers, qui selon elles étaient employés par l’entreprise, pour les mettre en œuvre128. La NFA et NFC réfèrent aux villageois comme à des « occupants illégaux » sur les terres forestières, faisant référence à une directive de haut niveau sanctionnant les expulsions à Mubende, mais leurs arguments sont discutés par les communautés déplacées et n’ont pas encore été examinés en détail par les tribunaux ougandais129. NFC nie toute implication dans le processus d’évacuation et soutient que les villageois ont quitté volontairement leurs terres. Les travaux de recherche menés par le Centre de recherche forestière internationale (CIFOR) sur plusieurs cas en Afrique subsaharienne ont conclu que malgré la diversité des contextes nationaux et des lois, les investissements fonciers finissent souvent par avoir les mêmes résultats pour les collectivités locales. Les droits coutumiers, par exemple, ont rarement été protégés de manière adéquate dans le cadre des négociations relatives aux terres, malgré une reconnaissance juridique généralisée de ces droits. Ces travaux ont permis d’aboutir à la conclusion que « les résultats sont étonnamment similaires, malgré une grande variété de cadres juridiques et institutionnels pour la protection des droits coutumiers et pour la réglementation de l’acquisition de terres à grande échelle130. » 32 De même, le planteur d’huile de palme PT MAS a exploité les incohérences des politiques foncières indonésiennes131. Le système foncier Dayak du Kalimantan occidental est régi par la loi adat (droit coutumier) : même si la terre est une propriété commune, les particuliers peuvent obtenir des droits pour l’utiliser. Les limites de terres individuelles ne sont pas fixées, mais elles sont fondées sur des souvenirs, et les droits fonciers sont transmis de génération en génération. Dans la zone de régence de Sanggau, un tiers des terres a été désigné par le gouvernement local comme izin lokasi, ou comme terres que les entreprises peuvent partager avec les communautés s’ils savent les convaincre en ce sens. Cela a souvent signifié que certains dirigeants de communautés étaient cooptés par les entreprises ou les collectivités locales pour convaincre - ou contraindre - les familles à céder leurs terres132. En pratique, cela signifie souvent que le chef du peuple autochtone (le Adat kepala), le chef du village, et le sous-chef du village reçoivent un salaire mensuel de l’entreprise qui exploite l’huile de palme. « Par conséquent », note Sawit Watch, « les chefs de village et les chefs ne représentent pas la communauté, mais représentent efficacement l’entreprise à l’encontre leur propre communauté. » Absence de recours En pratique, les gens se contentent de transactions qui sont, dans le langage théorique de la négociation, mieux que ce qu’ils voient comme leur meilleure alternative à un accord négocié (BATNA)134. Si une petite exploitante dont les droits fonciers sont menacés croit qu’elle peut trouver une meilleure offre par une autre voie, telle que la violence ou un tribunal, elle ne règlera pas la situation par voie de négociation. Toutefois, si elle sent qu’elle n’a pas d’autre option, il est probable qu’elle acceptera pratiquement toute proposition. Si elle sait que son droit à la terre est faible, que les tribunaux sont corrompus ou inefficaces, et qu’elle peut être battue par la police ou par des malfrats engagés à cet effet, elle n’aura pas de meilleure option que de donner son consentement. Cette tendance est illustrée par les réponses des villageois dans l’un des cas étudiés par Oxfam lorsqu’ils répondent à des questions relatives à ce qu’aurait été leur choix si une compensation leur avait été offerte. Tous affirment qu’ils auraient accepté, même sans connaître le contenu de la proposition. Il est crucial de renforcer les droits des femmes paysannes et d’autres producteurs d’aliments à petite échelle, et leur accès à la justice. Permettre aux personnes affectées par les transactions d’acquisition de terres d’exercer leur consentement libre, informé et préalable permettra de s’assurer qu’elles connaissent leurs droits et qu’elles sont en mesure de les exercer. En revanche, l’absence de la primauté du droit et d’accès à la justice peut conduire à des conflits violents, qu’ils soient initiés par les intérêts d’investissement de l’élite ou par les collectivités qui tentent de s’accrocher à leur terre. Les communautés lutteront quand une chose aussi fondamentale que leur terre est menacée. La terre est le fondement de leurs moyens de subsistance, de leur identité et de leur survie. 33 Les négociations portant sur la terre se déroulent rapidement et derrière des portes closes. Mais le secret et la précipitation ne sont pas les amis des bonnes affaires. Plutôt que de se précipiter dans la conclusion de contrats fonciers, les gouvernements devraient promouvoir la transparence, un débat public vigoureux sur l’avenir de l’agriculture dans leurs pays. Lorenzo Cotula, lIED.133 4 Dysfonctionnements à l’échelon international Les cas ici présentés sont liés aux marchés internationaux par l’intermédiaire de la finance et du commerce. Lorsque des mécanismes de responsabilisation nationaux et régionaux échouent, il existe des instruments internationaux qui devraient empêcher les pratiques abusives ou irresponsables. Mais ces mécanismes fonctionnent-ils ? Instruments de défense des droits humains Les conventions relatives aux droits humains contiennent des obligations claires en ce qui concerne la négociation d’acquisitions de terres à grande échelle. Celles-ci ne s’appliquent pas seulement aux gouvernements des pays hôtes, mais également aux entreprises qui investissent ou s’approvisionnent dans de telles opérations, ainsi qu’aux gouvernements des pays d’origine dans les pays où les investisseurs ont leurs sièges.135 Mais le système des droits de l’homme ne fournit pas souvent des informations pratiques, des mécanismes efficaces à la disposition des individus et des communautés pour responsabiliser les sociétés et les gouvernements des pays d’origine. Plusieurs régions (Afrique, Europe et Amérique) disposent de tribunaux régionaux et de commissions des droits de l’homme qui permettent aux individus et aux communautés de porter plainte contre les gouvernements. Ces instruments juridiques ont été testés, quoique rarement, concernant les opérations des entreprises étrangères. • La Cour interaméricaine des droits de l’homme compte une riche jurisprudence sur la protection des droits de propriété collectifs des peuples autochtones, et a, dans certains cas, statué que les États n’avaient pas respecté leur obligation d’obtenir le consentement libre, informé et préalable des communautés affectées 136. Ainsi, dans une affaire prise en charge par le partenaire d’Oxfam du programme Forest Peoples, le tribunal a statué que le gouvernement du Suriname devait examiner et envisager de revoir les concessions minières et d’exploitation de bois qu’elle avait accordées137. • La Commission africaine des droits de l’homme et des peuples a statué en faveur des droits fonciers des communautés pastorales Endorois au Kenya, suite à un conflit avec le gouvernement relatif à la création d’une réserve de chasse sur leurs terres138. 34 Il est important que les rouages du système juridique international se développent afin de protéger les droits fonciers et de sorte que les communautés lésées soient en mesure de tester les systèmes en place. La cause profonde de la situation complexe qui sépare les entreprises et des droits de l’homme aujourd’hui réside dans les lacunes de la gouvernance générées par la mondialisation - entre l’envergure et l’impact des forces et acteurs économiques, et la capacité des sociétés à gérer leurs effets préjudiciables. Ces lacunes de la gouvernance procurent un environnement permissif propice aux actes illicites commis par des sociétés de toutes sortes, sans répression ou réparation adaptées. Le fait de découvrir comment réduire et finalement combler ces vides en matière de droits de l’homme est notre principal défi. John Ruggie, Représentant spécial de l’ONU pour les droits de l’homme et les affaires.139 Même si ces décisions ont créé des précédents importants, il s’agit de rares exemples, et dans les cas décrits dans ce document, les tribunaux n’ont pas prévu de recours. Protection, respect et réparation Afin de proposer des mesures destinées à combler les lacunes de la gouvernance dans l’application des principes des droits humains dans le cadre d’opérations commerciales, le Secrétaire général des Nations Unies a nommé un Représentant spécial des droits de l’homme et des sociétés transnationales et autres entreprises, John Ruggie, qui est récemment arrivé au terme de son mandat de six ans. Même si le mandat a permis de créer un cadre général et un ensemble de principes directeurs, désormais appuyés par le Conseil des droits de l’homme, un mécanisme de suivi fait encore défaut140. Ce qui est désormais connu sous l’appellation de Convention-cadre des Nations Unies est construit autour de l’idéal « protéger, respecter et remédier ». Les États ont le devoir de protéger les personnes contre les violations des droits humains commises par des tiers, y compris les entreprises, les sociétés ont la responsabilité de respecter les droits de l’homme, et les gens doivent bénéficier d’un accès plus efficace aux réparations.141 Ce cadre et ses principes indiquent les rôles suivants pour les entreprises afin qu’elles répondent à leurs obligations internationalement reconnues relatives aux droits de l’homme : • identifier, prévenir et atténuer les effets préjudiciables de leurs opérations sur les droits humains ; • exercer les contrôles préliminaires relatifs aux effets préjudiciables aux droits de l’homme que l’entreprise peut produire dans le cadre de ses activités, ou qui peuvent être directement liés à ses activités, produits ou services grâce à ses relations d’affaires (en d’autres termes, une entreprise doit assumer la responsabilité de l’ensemble de sa chaîne d’approvisionnement) ; • communiquer avec l’extérieur sur la façon dont la société traite l’impact de ses activités sur les droits de l’homme, et • fournir aux victimes l’accès à des réparations effectives142. Le comportement des sociétés décrit dans cette note d’information est encore loin de se conformer à ces obligations. 35 Gouvernements des pays d’origine La Convention-cadre des Nations Unies souligne également l’importance du contrôle de l’État, notamment la surveillance des entreprises opérant à l’étranger. Il appelle les gouvernements à prévoir des voies de réparation efficaces pour remédier à des violations aux droits humains commises par les entreprises. Les investisseurs profitent souvent de la mauvaise gouvernance ou de son absence au niveau national pour acquérir des terres. Pour remédier à cela, les pays d’origine (ceux où les investisseurs sont basés) devraient mettre en place des règles et des garanties juridiques plus strictes pour les entreprises, indépendamment du lieu où ils opèrent, afin de promouvoir la transparence, de réglementer les pratiques commerciales, et de permettre aux communautés d’obtenir réparation. Transparence Les dispositions légales relatives à la transparence sont importantes dans le contexte des accaparements de terres, car les informations relatives aux investissements (par exemple, qui est impliqué, qui a été informé, quelle quantité de terre a été louée ou achetée, et pour combien de temps) sont souvent vagues. Un manque de transparence limite à la fois l’implication des groupes de la société civile dans la négociation et la mise en œuvre des accords, et la capacité des acteurs locaux à répondre aux nouveaux défis et à saisir les opportunités. Elle porte également préjudice à leur pouvoir de négociation. À ce jour, il est difficile pour les collectivités locales (ou leurs alliés nationaux et internationaux) de savoir qui se trouve réellement derrière le financement ou la gestion d’un investissement foncier, et quel est l’ensemble normatif qu’ils doivent respecter. À l’heure actuelle, les régimes juridiques des principaux États des pays d’origine ne prescrivent pas la transparence en matière d’investissements fonciers et dans le domaine de l’eau dans les pays en développement. La Loi des États-Unis Dodd-Frank (2010) crée de nouvelles obligations relatives à la transparence des investissements, mais ce texte se limite à encadrer les industries extractives143. Les efforts déployés pour promouvoir la transparence au niveau international pourraient constituer une étape importante, dans la mesure où l’on tire des enseignements de l’impact limité des autres initiatives, telles que l’Initiative relative à la transparence des industries extractives (ITIE). Alors que l’on s’attend à ce que l’ITIE crée un espace pour les organisations nationales de la société civile et en aide à faire la lumière sur les flux financiers, son impact est limité, car l’adhésion à ce projet se fait sur une base volontaire. Ses obligations excluent également les détails concernant le contenu du contrat ou la transparence relative aux consultations réalisées avant que les contrats ne soient finalisés. En attendant, les initiatives de la société civile contribuent à faire la lumière sur ce qui reste une activité très secrète144. 36 Pratiques commerciales Même si les lois visant à promouvoir la transparence sont limitées dans les États des pays d’origine, certaines mesures sont déjà en place pour réglementer les investissements étrangers et les pratiques commerciales. Aux États-Unis existe la Loi de 1977 Foreign Corrupt Practices Act (FCPA) et la Loi Dodd-Frank de 2010, tandis que le Royaume-Uni a introduit en 2010 la Loi contre la corruption (Bribery Act). Ces lois créent des obligations au regard des pratiques commerciales à l’étranger des entités américaines et britanniques. La FCPA, par exemple, contient une disposition anticorruption qui pourrait être pertinente pour les investissements fonciers contestés en raison des pratiques de corruption que la façon dont les transactions sont effectuées implique. La loi est unique dans la mesure où elle fait des investissements à l’étranger une question juridique aux États-Unis (où les entreprises ont souvent leur siège), plutôt que seulement dans le pays hôte, où les institutions juridiques et autres mécanismes d’application sont souvent insuffisamment développés. Normes sectorielles et d’investissement Bien qu’il soit difficile de se mettre d’accord et de mettre en œuvre des instruments juridiques internationaux relatifs aux droits humains qui puissent fournir une protection efficace contre les abus de pouvoir des entreprises, d’autres initiatives peuvent jouer un rôle essentiel pour combler le déficit de gouvernance à l’échelle mondiale - à la fois à court terme, comme mécanismes efficaces pour le règlement des opérations sur titres, et à long terme, comme tremplins pour l’avenir de la gouvernance internationale. Ainsi, les principes directeurs à l’intention des entreprises multinationales145 de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) ont l’appui des entreprises, des gouvernements, des syndicats, et de nombreuses ONG (y compris Oxfam). Les principes directeurs s’appliquent à toutes les entreprises basées dans les pays de l’OCDE qui sont impliquées dans des activités transnationales, et s’inspirent fortement des travaux de Ruggie sur les droits de l’homme. Elles obligent les gouvernements participants à mettre en place des Points de contact nationaux pour traiter les plaintes soulevées par les parties prenantes au sujet de possibles violations de ces principes par une entreprise, et à fournir la possibilité de porter plainte aux communautés affectées par les types de projets qui sont présentés dans cette note. À ce jour, plus de 200 cas ont été soulevés grâce à ce dispositif. En plus de cela, il existe des règles, des normes et des mécanismes qui ont été développés au sein du secteur privé lui-même, au niveau des entreprises ou au niveau de secteurs, parfois dans la cadre d’initiatives multipartites (MSI). Les entreprises qui ont pleinement intégré de bonnes pratiques dans leurs opérations commerciales et leurs stratégies sont souvent la force motrice derrière des initiatives 37 sectorielles volontaires pour adopter et appliquer des normes communes. Il s’agit notamment des Principes de l’Équateur, qui mettent en avant des garanties sociales et environnementales pour le secteur financier, et des Principes et critères de la Table ronde pour l’huile de palme durable (RSPO), qui régissent la production et la transformation d’huile de palme. Les MSI ne peuvent jouer qu’un rôle limité pour combler les lacunes de la gouvernance créées par la mondialisation, puisqu’elles peuvent influencer leurs membres et, indirectement, leurs partenaires commerciaux. Mais elles peuvent jouer un rôle fondamental pour promouvoir un environnement qui conduise à l’introduction de règles juridiques applicables, que ce soit au niveau international ou national, dans les pays affectés. Certaines d’entre elles comprennent des dispositifs de grief qui peuvent être des outils utiles pour les communautés affectées. Normes et règles pour le secteur financier La SFI a défini des critères stricts pour déterminer dans quels projets elle doit investir, qu’il s’agisse de consultation communautaire, ou de mesures de protection sociale et environnementale. À ce jour, de nombreuses institutions financières publiques et privées se réfèrent à ces normes de performance146. Elles forment par exemple la base des Principes de l’Équateur147. Les institutions financières internationales, les industries extractives, et les dirigeants de fonds d’investissement socialement responsables ont exprimé un soutien croissant en faveur du principe de consentement libre, informé et préalable ces dernières années. Comme l’a remarqué la SFI, les discussions relatives à ce principe au sein des institutions internationales sont passées de la question : devons-nous les mettre en œuvre ? À comment les mettre en œuvre148 ? La SFI dispose également d’un mécanisme de règlement des litiges grâce au conseiller-médiateur indépendant (CAO)149, qui a aidé les communautés du Kalimantan occidental, en Indonésie, notamment pour résoudre les questions litigieuses concernant le planteur de palmiers à huile Wilmar (voir encadré 6). Toutefois, malgré ce succès, peu d’organisations de la société civile se sont tournées vers le CAO ou les Comités de plaintes d’autres investisseurs150. Encadré 6 : Une plainte peut aboutir : l’affaire Wilmar Depuis les années 1980, le Groupe de la Banque mondiale, au travers de la SFI, a investi plus de 2 milliards de dollars dans la promotion du commerce mondial de l’huile de palme. Une des entreprises recevant un financement de la SFI est le Groupe Wilmar, basé à Singapour. Comme d’autres compagnies, Wilmar a été accusé d’accaparement de terres, de déboisement étendu et de violations généralisées des droits de l’homme dans la Kalimantan occidental. Un membre de la communauté de Dusun Sajingan Kecil, à Desa Semanga, dans le Kalimantan occidental, était cité dans le premier rapport de 151 développement durable de Wilmar (à partir de 2009) : « Au début de l’année 2005, nous avons travaillé dans la jungle et nous avons observé que certaines terres avaient été défrichées. Lorsque nous avons essayé de découvrir qui était derrière ces actions, nous avons découvert qu’il 38 s’agissait de PT ANI [PT Agro Nusa Investama, une filiale de Wilmar opérant dans le Kalimantan occidental, en Indonésie]... La perte de la terre signifie la perte de nos moyens de subsistance. Notre chef de communauté a rencontré le directeur des.terres en question. On nous a dit que l’entreprise ne savait pas que ces terres nous appartenaient. Nous avons demandé que l’entreprise arrête les travaux et restaure la zone défrichée, mais ils ne l’ont pas fait et nous n’avons pas pu trouver de solution. » En 2007, les groupes communautaires ont déposé une plainte formelle auprès de le CAO, concernant l’investissement de la SFI dans les opérations du secteur aval de Wilmar.* Les communautés ont soulevé un certain nombre de préoccupations, à savoir le rachat par Wilmar des terres des peuples autochtones sans leur consentement, le défrichement illégal, la déforestation, et le manquement de la part de Wilmar à ses obligations de fixer les zones convenues pour les petites exploitations. Le CAO a révélé que Wilmar avait reconnu avoir exploité des terres communautaires sans le consentement libre, informé et préalable de ces communautés, et que cet écueil (ainsi que les autres problèmes soulevés) devait être résolu. En 2008, le processus de résolution des différends qui a suivi a donné naissance à des ententes négociées entre Wilmar et plus de 1 000 membres de la communauté du Kalimantan occidental. Les accords comprenaient une indemnité pour les terres, la restitution de 1 699 hectares de terres forestières communautaires, et la répartition des fonds de développement à chaque communauté. Wilmar a également accepté de mettre en œuvre une nouvelle approche pour traiter les questions liées à la terre et aux conflits sociaux, et a déclaré qu’elle travaillait sur l’intégration du principe de consentement libre, informé et préalable dans toutes ses actions. La surveillance de ces accords est en cours. Les questions liées aux processus locaux d’approbation et aux droits fonciers se sont révélées être une préoccupation pour l’ensemble du secteur. Le Groupe de la Banque mondiale dans son ensemble a revu sa stratégie concernant l’huile de palme, dans le cadre d’un processus de consultation mondiale au cours duquel existait un moratoire sur tous les investissements dans l’huile de palme. L’analyse a souligné que le régime foncier et l’aménagement du changement sont au cœur d’une approche responsable de la filière de l’huile de palme. Cet examen a reconnu le rôle clé d’une forte gouvernance foncière, pour contrebalancer les fortes incitations économiques en faveur d’une expansion à grande échelle. L’examen a également conduit à la promotion de projets sur des « terres dégradées » au lieu de forêts communautaires ou de terres agricoles de subsistance, et a aussi permis de proposer un changement en faveur d’investissements bénéfiques aux petits exploitants. Le défi de mettre les entreprises face à leurs responsabilités reste énorme : Wilmar à elle seule indique être impliquée dans la résolution de 43 conflits à Kalimantan et 5 à Sumatra. L’organisation indonésienne Sawit Watch surveille plus de 600 conflits liés à l’huile de palme. * La plainte a été appuyée entre autres par Oxfam, Sawit Watch, et le Programme Forest Peoples Sources : Programme Forest Peoples, documents publiés sur le site de la SFI, http://www.forestpeoples.org/topics/responsible-finance/international-finance-corporation-ifc (dernière consultation en juillet 2011) ; Wilmar International Ltd (2009) « Rapport de développement durable », Singapour: Wilmar International Ltd, p.52, 53-54, 56 ; CAO (2009) « Rapport final d’évaluation du médiateur, mars 2009, sur la plainte de Communautés à Kalimantan et de la société civile concernant les activités du Groupe de sociétés Wilmar, à Washington DC: Conseiller/médiateur du bureau de conformité (CAO) ; CAO (2007) « Preliminary Stakeholder Assessment, November 2007, Regarding Community and Civil Society concerns in relation to activities of the Wilmar Group of Companies », Washington, D.C.: Conseiller/médiateur du bureau de conformité (CAO) ; Communications privées avec Sawit Watch (www.sawitwatch.or.id – dernière consultation en juillet 2011) 39 Selon Oxfam, l’échec des normes et règles internationales pour préserver les communautés des effets dévastateurs des accaparements de terres152 est patent dans le cas de NFC en Ouganda. NFC est soutenu par des investissements venant d’institutions financières internationales et de banques dont les processus de contrôle semblent échouer à ce niveau. La SFI a examiné l’activité de NFC à Mubende dans le cadre de son processus de contrôle pour son investissement de 7 millions d’USD dans Agri-Vie, un portefeuille de fonds de placement de l’agro-industrie qui comprend NFC. D’une part, la SFI a conclu que NFC n’était pas en mesure d’appliquer de façon exhaustive les principes qui guident la réinstallation dans le cadre des normes de performance de la SFI relatives à l’acquisition de terres et à la réinstallation involontaire. Ces normes reconnaissent que l’acquisition de terres dans la perspective d’un projet et les limitations à l’usage des terres peuvent avoir un effet pervers sur les communautés qui utilisent ces terres et exige donc que les communautés concernées reçoivent une indemnisation, une réinstallation et la restauration de leurs moyens de subsistance153. Toutefois, parce qu’il s’agissait d’un cas d’installation conduite par le gouvernement et puisque NFC avait démontré, selon la SFI, « tous les efforts possibles pour participer et collaborer avec l’agence du gouvernement », la SFI était satisfaite du respect de la norme par NFC « dans la mesure où l’installation était autorisée par le Gouvernement154 ». L’évaluation de la SFI ne couvre pas les activités menées par NFC à Kiboga. La Banque européenne d’investissements, l’institution de financement de l’UE, dispose également de normes et de critères sociaux et environnementaux pour les projets qu’elle finance. La BEI a financé l’expansion des activités de NFC à Namwasa grâce à un prêt de 5 millions d’euros, auquel s’ajoute une subvention de 650 000 euros pour financer la politique de Responsabilité sociale de l’entreprise (RSE). Tout comme la SFI, la BEI soutient aussi NFC indirectement grâce à un investissement de 12 millions de dollars dans le fonds de valeurs mobilières Agri-Vie. La BEI déclare qu’elle était consciente des litiges fonciers entre les communautés et NFC et du risque que cela représentait pour ce projet. La BEI affirme que, indépendamment des résultats des procédures légales en cours, elle est satisfaite de l’Évaluation d’impact environnemental du projet, et elle pense que la NFC a agi selon ses droits. Elle considère que le projet est tout à fait en règle avec ses normes et principes sociaux et environnementaux, qui comprennent une norme relative à la réinstallation involontaire exigeant que « les populations dont les moyens de subsistance sont affectés par un projet devront voir leurs moyens de subsistance améliorés ou au moins restaurés et/ou indemnisés de façon adaptée aux pertes subies »155. À nouveau, la BEI ne semble pas avoir évalué les activités de NFC à Kiboga. La banque HSBC a investi 10 millions USD dans NFC, détient 20% de l’entreprise et a également un siège au conseil d’administration de NFC. La banque a soumis son investissement dans NFC à la condition que l’entreprise fasse des progrès pertinents pour satisfaire à la 40 certification de la FSC156. HSBC a également un certain nombre de politiques de durabilité pour les « secteurs sensibles », y compris une Politique du secteur des produits issus de l’exploitation forestière et des terres forestières, et affirme que NFC répond aux critères de durabilité requis par la banque pour ce secteur157. Toutefois, les politiques de HSBC (et celles d’autres investisseurs) reposent largement sur la garantie fournie par la confirmation indépendante d’organismes extérieurs comme la FSC, et selon Oxfam ce dossier met en évidence de graves lacunes dans ces processus de d’accord indépendant, tel qu’indiqué ci-dessus. Dans le cas de HSBC, la dépendance à la certification FSC est particulièrement préoccupante, sachant que la banque - un membre du Conseil - était consciente de l’existence d’affaires portées en justice contre NFC visant à faire valoir des droits légaux sur les terres destinées à la plantation. Encadré 7 : Une nouvelle vague de financement : l’investissement sans intervention Il existe une tendance croissante à la SFI qui consiste à prêter par le biais d’intermédiaires financiers (IF), comme les banques ou fonds privés de capitaux propres, au lieu de gérer des prêts et des investissements. Au cours de l’exercice financier de 2010, le prêt par l’intermédiaire d’IF représentait plus de la moitié de tous les nouveaux engagements des projets de la SFI. Oxfam estime que les normes de performance de la SFI devraient s’appliquer à tous les projets d’IF sans aucune ambiguïté. Les prêts de la SFI par le biais d’IF manquent de transparence et accordent une attention insuffisante aux préoccupations sociales et environnementales, en déléguant la plupart des travaux d’évaluation, de suivi et de surveillance à l’IF. Les communautés touchées ignorent souvent que le financement de la SFI appuie le projet, et sont donc peu susceptibles d’utiliser son mécanisme de recours. Dans le cas de NFC en Ouganda, le soutien de la SFI intervient via un fonds d’investissement de l’agro-industrie Agri-Vie, et dont NFC complète le portefeuille. Agri-Vie affirme que toutes les entreprises qui ont investi doivent satisfaire aux normes de performance de la SFI, dit avoir procédé à des contrôles préliminaires approfondis avant de réaliser son investissement dans NFC et pense que NFC respecte pleinement les normes de 158 performance de la SFI . Cependant ces normes ont échoué à protéger les moyens de subsistance des populations déplacées à Kiboga et Mubende. Oxfam pense que la SFI, même si elle est privée d’une étape du contrôle par l’intermédiaire du fonds Agri-Vie, devrait revoir les échecs de ses contrôles préliminaires et de ses processus de surveillance dans ce dossier et en être tenue responsable. Si des défauts sont identifiés, il faudra faire en sorte qu’ils ne se reproduisent plus dans le futur. Sources : Bretton Woods Project /ULU Foundation (2010) ‘Out of sight, out of mind? IFC investment through banks, private equity firms and other financial intermediaries », http://www.brettonwoodsproject.org/art-567190 (dernière consultation en juillet 2011) ; Projet de Bretton Woods (2011) « IFC standards revision leaves out human rights », http://www.brettonwoodsproject.org/art-567600 (dernière consultation en juillet 2011) . 41 Normes en vigueur dans les chaînes de valorisation Les individus et les communautés touchées pourraient également se tourner vers d’autres parties prenantes (surtout en aval) de la chaîne de valeur pour exercer un recours. Les mécanismes de recours de la Forest Stewardship Council (FSC) et de la RSPO pourraient fournir des pistes intéressantes pour les communautés affectées dans les affaires examinées dans la présente note d’information159. La FSC certifie des investissements forestiers qui adhèrent aux meilleures pratiques d’exploitation en termes de conditions de travail, de questions sociales et environnementales. En 2010, plus de 120 millions d’hectares ont été certifiés par la FSC dans plus de 80 pays du monde ; l’équivalent d’environ 5 % des forêts de production du monde. Alors que les Principes et critères de la FSC exigent la protection des droits locaux de propriété, d’usage et d’accès, la certification des activités ne remplissent pas toujours ces exigences, comme c’est le cas de la plantation de NFC à Mubende, qui a reçu la certification FSC, malgré ce qui semble selon Oxfam être une violation de ces droits. Ainsi, le 2ème Principe de la FSC relatif aux droits et responsabilités de propriété et d’usage exige que « des mécanismes appropriés soient employés pour résoudre les litiges concernant la propriété et l’usage des droits » et précise que « les litiges d’importance substantielle qui impliquent un nombre important d’intérêts empêcheront normalement la certification d’une exploitation ». Le Principe 4, relatif aux relations communautaires et aux droits du travailleur exige des mécanismes appropriés « pour fournir une indemnisation juste en cas de perte ou de dommage qui affectent les droits légaux ou coutumiers, la propriété, les ressources ou les moyens de subsistance des populations locales160 ». Un audit de contrôle de la FSC mené sur la plantation de NFC à Mubende, conduit par le consultant de la FSC, SGS, en juin 2010, a conclu que « l’entreprise a respecté des moyens pacifiques et a agi de manière responsable pour résoudre le problème de l’occupation illégale et actuellement il n’existe plus de litiges relatifs à la propriété ou aux droits d’utilisation d’importance substantielle de nature à affecter les activités de l’entreprise ». SGS indique aussi que la validité des affaires en justice est « très suspecte »161. La base de cette évaluation n’est pas claire selon Oxfam et, compte tenu des affaires en cours, celles-ci impliquant un nombre important de demandeurs, et les rapports des communautés indiquant qu’aucune indemnisation n’a été fournie pour les pertes de propriété et de moyens de subsistance, Oxfam juge que les Principes 2 et 4 de la FSC n’ont pas été respectés162. Le RSPO, une initiative multipartite lancée en 2004, a permis de réunir les producteurs de palmiers à huile, les transformateurs, les négociants, les fabricants de biens de consommation, les détaillants, les banques, les investisseurs, et les ONG environnementales et sociales, pour élaborer et appliquer des normes mondiales pour une exploitation durable de l’huile de palme. Unilever, Nestlé, McDonald et Burger King ont déjà déclaré que d’ici 2015 toute l’huile de palme utilisée dans leurs procédés de fabrication sera obtenue de façon responsable. En dépit de certains succès dans l’amélioration des 42 pratiques de certaines grandes entreprises d’huile de palme dans le Sud-Est asiatique, le RSPO n’atteint pas encore beaucoup d’autres entreprises opérant dans la région. Il a encore moins d’influence dans les régions où l’exploitation de l’huile de palme émerge de façon croissante, notamment en Afrique occidentale et en Amérique latine. Encadré 8 : les investissements agricoles responsables favorisent-ils ou découragent-ils la multiplication des transactions foncières ? En dépit de la controverse largement répandue parmi les observateurs, un nouvel ensemble de principes visant à encourager les entreprises à investir de manière responsable dans le foncier est promue par la Banque mondiale et les trois organisations des Nations Unies (FAO, FIDA et CNUCED). Cet ensemble est appelé Principes pour des investissements agricoles responsables. Ces derniers incitent les entreprises à respecter les droits locaux, à assurer la transparence, et à agir de manière sociale et écologique. Certains observateurs sont catégoriques sur le fait que l’intention est de contribuer à éradiquer les transactions portant sur la construction de méga-fermes. D’autres sont tout à fait convaincus que les principes sont une façade pour contribuer à légitimer l’accaparement de terres et faciliter la « prise de contrôle à long terme des entreprises (étrangères et nationales) sur les terres agricoles des populations rurales ». Quelle que soit leur intention, ces principes sont non seulement plus faibles que toutes les autres normes mentionnées dans ce document (y compris les propres normes de performance de la Banque mondiale), ils sont aussi tellement éloignés de la mise en œuvre qu’ils ne peuvent pas être considérés comme une réponse sérieuse aux problèmes largement répandus, urgents et pressants décrits dans cette note. Sources : Plate-forme d’échange des connaissances pour des agro-investissements responsables (IAR), http://www.responsibleagroinvestment.org/ (dernière consultation en juillet 2011) ; GRAIN (2011) « Il est temps d’interdire l’accaparement des terres, et non pas de le rendre responsable ! », Barcelone : GRAIN, http://www.grain.org/o_files/RAI-EN.pdf (dernière consultation en juillet 2011) CDM Watch a eu raison d’éveiller les esprits sur des problèmes. Le conseil a entrepris une enquête et après examen complet, a constaté que la consultation répondait aux exigences de CDM en vertu des paramètres de son mandat. C’est une difficulté pour le Honduras de faire face à des conflits fonciers peu communs et de déterminer la responsabilité de la violence dans la région. Martin Hession, Président, Conseil d’administration du CDM163 Politiques aux effets pervers Certaines politiques gouvernementales nationales et internationales, quoique bien intentionnées, servent dans la pratique à amoindrir les droits fonciers des communautés locales, et fournissent des incitations qui augmentent la pression pour la terre, ou protègent des investissements nuisibles. Au nom de l’atténuation des émissions de carbone, l’UE et les ÉtatsUnis (ainsi que d’autres) ont introduit des mesures en faveur des agrocarburants au cours de la dernière décennie. Cela en dépit du fait que la contribution des agrocarburants à la réduction des émissions a été sérieusement questionnée, et que la production d’agrocarburants est toujours plus liée à hausse des prix des denrées alimentaires et à la pression foncière164. En effet, la forte demande d’agrocarburants est à l’origine de l’émergence d’investissements fonciers préjudiciables. 43 Un autre exemple est le Mécanisme pour un développement propre (MDP) des Nations Unies, l’un des instruments créés par le Protocole de Kyoto pour faciliter le commerce du carbone165. Le conseil du MDP a enregistré une installation de biogaz à Dinant’s Exportadora del Atlántico au Honduras en tant que projet de réduction des émissions, permettant ainsi à l’entreprise de vendre des crédits carbone certifiés sur le marché166. Les réductions d’émissions de plus de 200 000 tonnes que Dinant s’attend à réaliser d’ici à en 2017 pourraient générer plusieurs millions de dollars pour l’entreprise. La candidature de Dinant au MDP a été acceptée malgré l’intervention de deux groupes de défense des droits de l’homme ; FIAN et CDM Watch, qui ont documenté une expulsion violente et des violations des droits de l’homme167 liés au projet de Dinant dans la vallée de Bajo Aguán168, et malgré les préoccupations soulevées par le gouvernement britannique, les marchés du carbone et de l’association des investisseurs169, et EDF Trading - qui s’est retirée de l’accord d’achat des crédits carbone du projet. Le conseil du MDP a toutefois expliqué que les préoccupations relatives aux droits de l’homme se situaient en dehors des compétences de son mandat concernant les décisions sur la reconnaissance des crédits carbone170. NFC cherche aussi à obtenir des crédits carbone provenant du MDP pour sa plantation de Mubende en Ouganda, et a fait valoir sa certification FSC pour les obtenir. Comme indiqué ci-dessus, Oxfam a de sérieuses préoccupations sur le processus de certification de la FSC171. De plus, il existe de nombreux traités bilatéraux d’investissement (TBI) (plus de 2 500), qui protègent les investisseurs contre les modifications de la politique du gouvernement du pays hôte, et qui peuvent compromettre la capacité des pays à réglementer les investissements de manière efficace172. En vertu de ces TBI, l’occasion pour les investisseurs de contester les politiques publiques à travers des procédures d’arbitrage réduit la capacité des pays en développement à réglementer leurs secteurs de denrées alimentaires, de la terre et de l’eau, et à introduire des politiques qui favorisent la sécurité alimentaire et la réduction de la pauvreté. 44 5 La terre est synonyme de pouvoir - la société sociale, politique et économique... et la société civile doivent continuellement en débattre. Rajagopal, Ekta Parishad, Inde. Cultivons la justice Le regain de la demande de produits agricoles sur le marché mondial représente un potentiel pour offrir aux communautés locales des opportunités dans des domaines d’investissement d’intérêt croissant. Mais, pour l’instant, ce contexte présente davantage de risques que d’opportunités pour les communautés. L’équilibre des rapports de force doit pencher en faveur des personnes les plus affectées par les transactions foncières. Le droit des communautés de savoir et de décider doit être respecté par toutes les parties concernées. Il existe un besoin évident d’action à plusieurs niveaux, tant pour s’assurer d’un changement structurel que pour remédier aux conflits qui émergent suite aux transactions décrites dans ce document. Recommandations Les injustices que les communautés ont subies dans les cas présentés dans ce document doivent être réparées. • Les droits des communautés affectées par l’accaparement de terres doivent être respectés, et leurs doléances entendues et traitées de manière impartiale, conformément au droit national et aux normes internationales. • Ceux qui financent et ceux qui profitent des projets d’acquisitions de terres, qu’il s’agisse d’acteurs nationaux ou domestiques, doivent utiliser leur influence pour veiller à ce que cela se produise. Ceci est valable pour les sociétés situées en aval de la chaîne d’approvisionnement. Il n’est pas acceptable que celles-ci se contentent de se dérober, en retirant leur soutien et se lavant les mains de telles situations. Un rééquilibrage est nécessaire en faveur des communautés et ayants droit locaux. Les gouvernements devraient : • Adopter des normes internationales fortes en matière de bonne gouvernance concernant les régimes fonciers et la gestion des ressources naturelles. Les directives volontaires pour la gouvernance responsable de la tenure des terres, des pêches et des forêts actuellement soumises à discussions au sein du Comité mondial de la sécurité alimentaire (CSA) représentent une opportunité pour atteindre cet objectif. 45 Les gouvernements des pays hôtes et les pouvoirs locaux doivent promouvoir un accès équitable aux terres et protéger les droits humains. • Envisager un moratoire sur les cessions de droits fonciers jusqu’à ce qu’une meilleure gouvernance des terres et une meilleure protection des droits soient définies au niveau national. • Respecter et protéger tous les droits existants relatifs à l’utilisation des terres, et s’assurer et vérifier que les détenteurs de droits locaux et les communautés aient donné leur consentement libre, informé et préalable avant de signer des transactions foncières ou d’attribuer des concessions. • S’assurer que les femmes aient les mêmes droits d’accès et de contrôle sur les terres que les hommes, dans toutes les lois pertinentes (y compris le droit de la famille). • Exiger la divulgation sans réserve des informations liées aux projets agricoles de grande envergure, y compris les détails des contrats. • Insister pour que les investisseurs mènent des évaluations d’impact social et environnemental exhaustives, y compris des évaluations des impacts sur la sécurité alimentaire au niveau national et local. • Mettre en œuvre des politiques agraires et foncières en faveur des pauvres, et envisager la redistribution des terres. • Interdire ou décourager la cession des droits fonciers des petits exploitants et les droits fonciers communaux. • Concevoir et mettre en œuvre des mécanismes de recours solides et justes pour traiter et régler les conflits fonciers. • Faciliter et soutenir le contrôle des projets agricoles et leur impact sur les communautés locales par les membres du parlement et les assemblées locales, les groupes de la société civile, les média et autres. • Soutenir les petits producteurs alimentaires dans la production, les investissements et l’organisation, de sorte qu’ils se trouvent dans une position plus forte pour résister à l’accaparement de terres. Les investisseurs dans des projets agricoles doivent : • Respecter les droits fonciers existants, et chercher le consentement libre, informé et préalable des titulaires de droits locaux et des communautés, avant de se lancer dans des activités foncières. • Éviter le transfert de droits fonciers (y compris la propriété foncière coutumière) de la part de petits producteurs de denrées alimentaires, et au lieu de cela proposer des contrats justes. • Réaliser et se baser sur des évaluations exhaustives de l’impact social et environnemental, y compris des évaluations d’impact sur la sécurité alimentaire locale et nationale, avant de s’engager dans toute activité foncière. 46 Les financiers et les entreprises acheteuses (négociants et transformateurs) de produits agricoles devraient assumer la responsabilité de ce qui se passe dans leurs chaînes d’approvisionnement : • Exiger que les fournisseurs et les clients adhèrent aux principes décrits précédemment. Examiner les clients/fournisseurs et remédier aux situations lorsqu’il existe des preuves de pratiques irresponsables. • Les financiers, y compris les institutions financières publiques (telles que la SFI et la BEI) devraient adhérer à des normes sociales et environnementales et à des garanties strictes. Celles-ci devraient s’appliquer de manière égale aux sous-projets faisant intervenir des intermédiaires financiers. • Concevoir et mettre en œuvre des mécanismes de recours solides et justes. Les gouvernements des pays d’origine doivent assumer la responsabilité des actes commis par les sociétés commanditaires à l’étranger : • Exiger des sociétés enregistrées d’assumer la pleine responsabilité de la chaîne d’approvisionnement, et demander à ce que toutes les opérations agricoles qu’elles financent, où qu’elles sous-traitent, adhèrent aux principes indiqués ci-dessus. • Exiger la divulgation exhaustive des informations de la part des entreprises et des institutions financières publiques, y compris celles relatives à l’impact des projets liés aux ressources foncières et aux ressources en eau. • Offrir des mécanismes aux personnes affectées dont les droits ont été violés pour placer les entreprises qui investissent ou soustraitent devant leurs responsabilités. • Renoncer à négocier ou signer des accords d’investissement, qui diminuent les droits des pays pour réguler les acquisitions de terres et fournir des recours lorsque les choses se passent mal. • Supprimer les mesures qui facilitent, encouragent, ou subventionnent les acquisitions de terres à grande échelle, y compris les obligations en matière d’agrocarburants, et éviter l’introduction de nouvelles mesures. Le public peut faire pression sur les gouvernements et les entreprises en faveur de la justice : • Demander des comptes aux investisseurs et aux traders. • Utiliser leur pouvoir en tant qu’électeurs, consommateurs, participants à des fonds de pension et investisseurs pour encourager l’action de la part de leurs gouvernements et des sociétés dont ils achètent les biens et services pour contribuer à l’arrêt des accaparements des terres. 47 La société civile, les médias et le monde universitaire peuvent contribuer à la défense des droits et au développement de la transparence : • Donner aux communautés affectées le pouvoir de faire valoir leurs droits face aux accaparements de terres. • Utiliser les mécanismes de responsabilisation, comme les bureaux de médiateurs et le recours au contentieux pour dénoncer des investissements préjudiciables. • Dénoncer les mauvaises pratiques, et, le cas échéant, reconnaître les bonnes pratiques. • Contribuer à renforcer la transparence, en partageant des informations sur l’accaparement des terres en association avec les organisations qui suivent ce phénomène. Davantage d’informations relatives aux transactions foncières peuvent être consultées sur les sites suivants : www.commercialpressuresonland.org www.farmlandgrab.org www.oxfam.org/cultivons 48 Notes 1 Rapport de synthèse en cours de préparation du CIT /CIRAD sur les pressions commerciales relatives aux projets de recherche de terres. Les chiffres de ce rapport sont fondés sur les recherches menées par la Land Matrix Partnership. Le partenariat se compose du CIT, du Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD), du Centre pour le Développement et l'Environnement (CDE) de l'Université de Berne, du GIGA de l'Université de Hambourg, de la Deutsche Gesellschaft für Internationale Zusammenarbeit (GIZ) et d’Oxfam. Depuis 2009, ils ont systématiquement rassemblé des informations sur les acquisitions de terres à l'échelle mondiale. L'ensemble de données couvre les transactions qui entraînent une cession des droits d'usage, de contrôle et de propriété sur les terres par le biais de concessions, de locations ou de ventes de contrôle ou propres terres, ce qui implique généralement une conversion de terres utilisées par les petits exploitants ou pour les services des écosystèmes à usage commercial de grande envergure. Ces données visent à faire la lumière sur six moteurs qui contribuent à la ruée mondiale pour la terre, à savoir la demande de nourriture, de carburant, de bois, la séquestration du carbone, le tourisme et de l'exploitation minière. Cet ensemble comprend maintenant un peu plus de 2 000 accords depuis 2000 jusqu’à ce jour. 1 100 à ce jour font l'objet de recoupement avec les données issues des inventaires nationaux systématiques des transactions foncières basées sur les études qui ont été menées dans les pays par différentes institutions, ainsi que sur le nombre croissant de projets de recherche de terrain commandés ou menés dans le cadre de troisième cycle universitaire. ILC (2011) « Tirana Déclaration: Securing land access for the poor in times of intensified natural resources competition », International Land Coalition, http://www.landcoalition.org/about-us/aom2011/tirana-declaration, (dernière consultation en juillet 2011). L'Initiative pour la sécurité alimentaire de L'Aquila (2009) « L'Aquila » « Déclaration commune sur la sécurité alimentaire », Sommet 2009 du G8, L'Aquila: Initiative pour la sécurité alimentaire de L’Aquila http://www.g8italia2009.it/static/G8_Allegato/LAquila_Joint_Statement_on_Global_Food_Security%5B1%5D, 0.pdf (dernière consultation en juillet 2011); le programme intégré pour le développement de l'agriculture en Afrique (CAADP), http://www.nepad-caadp.net (dernière consultation en juillet 2011) Voir, notamment Oxfam (2010) Think Big, Go Small: Adapting Business Models to incorporate smallholders into supply chains http://www.oxfam.org/en/policy/think-big-go-small (dernière consultation en août 2011). Ambrose Evans-Pritchard (2010) « The backlash begins against the world land-grab », le Telegraph, 12 septembre, http://www.telegraph.co.uk/finance/comment/ambroseevans_pritchard/7997910/The-backlashbeginsagainst-the-world-land-grab.html (dernière consultation en juillet 2011). Cité dans Robin Palmer (2011) « Would Cecil Rhodes have signed a Code of Conduct? Reflections on Global Land-grabbing and Land Rights in Africa, Past and Present », document présenté dans le cadre de la « Conférence internationale sur l'appropriation illicite de terres au niveau mondial », Université du Sussex, 6-8 avril 2011. Pour plus de détails, voir la note 1 Les cultures vivrières, la sylviculture, l'élevage, les agrocarburants, et d'autres cultures non alimentaires Banque mondiale (2011), « Rising global interest in Farmland: Can it Yield Sustainable and Equitable Benefits?’, Washington, D.C.: Banque mondiale », p.33, et p.50 « Selon les rapports de presse, les investisseurs étrangers ont exprimé leur intérêt pour près de 56 millions d'hectares de terre dans le monde en moins d'un an. » GRAIN http://econ.worldbank.org/external/default/main?pagePK=64165259&theSitePK=469382&piPK=64165421&m enuPK=64166322&entityID=000334955_20110208033706 (dernière consultation en septembre 2011). Susan Payne, (2011), « Positive Impact Investing in Agriculture – Economic Prosperity in Africa from a New Green Revolution », présentation réalisée lors du Sommet sur la sécurité alimentaire (Le Cap, mai 2011) http://www.omegainvest.co.za/downloads/FoodSecurity-Presentations/Susan%20Payne.pdf (dernière consultation en juillet 2011) De nombreux chercheurs affiliés à l'IIED et au Centre international de recherche forestière « CIFOR) ont formulé de tels appels lors de la Conférence internationale sur l'accaparement de terres (Université du Sussex, 6-8 avril 2011) et lors de la Conférence annuelle sur les terres et la pauvreté (Washington DC, 18-20 avril 2011). Ruth Meinzen Dick, IFPRI, a récemment déclaré « en 2009 que le bilan des couts et des bénéfices était véritablement peu clair. Maintenant [...] la charge de produire des preuves s'est déplacée et il incombe aux promoteurs de transactions foncières de démontrer qu'ils travaillent. » Cité dans The Economist, (2011) ‘The surge in land deals: when others are grabbing their land », 5 mai, http://www.economist.com/node/18648855 (dernière consultation en juillet 2011). Julie Crawshaw (2009) « Soros, Rogers Snapping Up Farmland On Demand Bet », moneynews.com, 15 juin, http://www.moneynews.com/Markets/soros-rogers-farmland/2009/06/15/id/330897 (dernière consultation en juillet 2011) HLPE (2011), « Land tenure and international investments in agriculture: Rapport du groupe d'experts de haut niveau pour la sécurité alimentaire et la nutrition, Rome, Comité mondial de la Sécurité alimentaire, juillet 2011, p.8. Banque mondiale (2011), op. cit., p.51. Le rapport de GRAIN « Seized! The 2008 land-grab for food and financial security » était le premier à faire valoir cette idée en octobre 2008. GRAIN (2008) « Seized! The 2008 land-grab for food and financial security », Barcelone : GRAIN, http://www.grain.org/article/entries/93-seized-the-2008-landgrab-for-food-and-financialsecurity (dernière consultation en juillet 2011). Karen Ward (2011) « The world in 2050. Quantifying the shift in the global economy », Londres : HSBC Global Research Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) (2006) « Livestock’s long shadow: 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 49 environmental issues and options », Rome: FAO, http://www.fao.org/docrep/010/a0701e/a0701e00.htm (dernière consultation en juillet 2011). 17 Près de la moitié de tous les aliments emballés et produits d'hygiène présents sur les étagères des supermarchés contiennent de l'huile de palme - depuis le dentifrice jusqu'aux biscuits. WWF (2010) «Rapport Planète Vivante 2010. Biodiversité, biocapacité et développement ", Gland: WWF, p.59. 18 19 20 21 22 D. Molden (ed.) (2007) « Water for Food, Water for Life: A Comprehensive Assessment of Water Management », Londres: Earthscan, et Colombo: International Water Management Institute. R. Clarke et J. King (2004) « The Atlas of Water », Londres: Earthscan Books. http://www.bis.gov.uk/go-science/news/speeches/the-perfectstorm ActionAid a estimé récemment que l'objectif de l'UE d'obtenir 10 % des carburants de transport à partir de sources renouvelables d'ici 2020 pourrait, si ces carburants proviennent seulement d’agrocarburants, exiger jusqu'à 17,5 millions d'hectares (équivalent à la moitié de l'Italie) de terres des pays en développement pour faire pousser ces ressources destinées aux agrocarburants industriels (ActionAid Royaume-Uni (2010) “Meals per Gallon: The impact of industrial biofuels on people and global hunger”, London: ActionAid UK, http://www.actionaid.org.uk/doc_lib/meals_per_gallon_final.pdf (dernière consultation, juillet 2011); Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), Fonds international de développement agricole (IFAD), Fonds monétaire international (FMI), Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), Programme alimentaire mondial (PAM), la Banque mondiale, l’Organisation mondiale du commerce (OMC),l’Institut international de recherche sur les politiques alimentaires (IFPRI) et l’Équipe spéciale de haut niveau des Nations Unies sur la crise de la sécurité alimentaire mondiale (UN HLTF) (2011) ‘Price Volatility in Food and Agricultural Markets: Policy Responses’, Paris: OCDE, http://www.oecd.org/dataoecd/40/34/48152638.pdf (dernière consultation, juillet 2011). Banque mondiale (2010), op, cit La part de la superficie mondiale consacrée à l'agriculture a augmenté régulièrement depuis les années 1960, avant de culminer à 38 % au début du 21ème siècle. Calculé en utilisant les statistiques fournies par la FAO: http://faostat.fao.org/site/377/default.aspx (dernière consultation en juillet 2011). Une étude récente a conclu que « nous devrions travailler sur l’hypothèse qu’il existe peu de nouvelles terres pour l’agriculture ». Voir Foresight (2011),The Future of Food and Farming, Final Project Report, The Government Office for Science, Londres, p. 34, http://www.bis.gov.uk/assets/bispartners/foresight/docs/foodand-farming/11-546-future-of-food-and-farming-report.pdf (dernière consultation, septembre 2011) Elizabeth Daley, « Gendered impacts of commercial pressures on land », ILC/CIRAD/Mokoro, 2011, pp 6–8 Cela a été démontré au niveau mondial par D. Maxwell et K. Wiebe (1998) « Land Tenure and Food Security: A Review of Concepts, Evidence and Methods’, Rapport de recherche N° 129, Wisconsin: Land Tenure Center. Ceci a également été démontré au niveau local par de nombreux chercheurs, entre autres R. Singh, P. Kumar, et T. Woodhead (2002) « Smallholder Farmers in India: Food Security and Agricultural Policy », Rome: FAO; R.S. Srivastava (2004) « Land reforms and the poor in India: an overview of issues and recent evidence’, in H. Gazdar et J. Quan (2004) ‘Poverty and Access to Land in South Asia: A study for the Rural Support Programmes Network, Pakistan’, Vol. 2: Etudes de pays, Department for International Development (DFID) / Rural Support Programmes Network (RSPN) / Natural Resources Institute (NRI); et H. Gazdar et J.Quan (2004) « Poverty and Access to Land in South Asia: A study for the Rural Support Programmes Network, Pakistan ». Vol. 1: Aperçu régional. DFID / RSPN / NRI. K. Deininger (2003), « Land Policies for Growth and Poverty Reduction ». Rapport de recherche politique de la Banque mondiale, Washington, DC et Oxford: Banque mondiale et Oxford University Press. Instituto Nacional de Estadística (2003) ‘Censo Nacional Agropecuario’, Guatemala City: Instituto Nacional de Estadística. Il convient de noter que le coefficient de Gini pour la distribution des terres au niveau frappant de 0,84. Mujeres y Conflictividad Agraria, Femmes et conflits agraires, présentation réalisée par l'Alliance des femmes vivant en milieu rural (Alianza de Mujeres Rurales) à l'occasion des Premières rencontres nationales agraires sur les conflits, 5 et 6 avril 2011. Daley (2011), op. cit. Tinyade Kachika (2010) ‘Land-grabbing in Africa: A Review of the Impacts and the Possible Policy Responses », Oxford: Programme international d'Oxfam centré sur l'Afrique Ibid. Le rôle des agences de promotion des investissements par rapport à la terre est traité dans Annie Dufey, Maryanne Grieg-Gran, et Halina Ward (éd.) (2008) « Responsible enterprise, foreign direct investment and investment promotion: Key issues in attracting investment for sustainable development’, Londres: IIED, http://pubs.iied.org/pdfs/15511IIED.pdf (dernière consultation en juillet 2011). Transparency International (2009) «Baromètre de la corruption mondiale », Berlin: Transparency International, p. 9, http://www.transparency.org/policy_research/surveys_indices/gcb/2009 (dernière consultation en juillet 2011). Pour le baromètre, 73 000 répondants de 69 pays ont été interrogés. Banque mondiale (2010), op. cit, p. xxxii. Access capital (2010) The Ethiopia Macroeconomic Handbook 2010, Addis Ababa: Access Capital, http://www.accesscapitalsc.com/downloads/The-Ethiopia-Macroeconomic-Handbook-2010.pdf (dernière consultation en juillet 2011) L'Initiative pour la sécurité alimentaire de L'Aquila (2009) « L'Aquila » « Déclaration commune sur la sécurité alimentaire », Sommet 2009 du G8, L'Aquila: Initiative pour la sécurité alimentaire de L’Aquila http://www.g8italia2009.it/static/G8_Allegato/LAquila_Joint_Statement_on_Global_Food_Security%5B1%5D, 0.pdf (dernière consultation en juillet 2011); le programme intégré pour le développement de l'agriculture en Afrique (CAADP), http://www.nepad-caadp.net (dernière consultation en juillet 2011) 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 50 39 Lucia Wegner et Gine Zwart (2011) « Who will feed the world? », Oxford: Oxfam International, http://www.oxfam.org/en/grow/policy/who-will-feed-world (dernière consultation en juillet 2011). Richard M. Auty (1993) « Sustaining development in mineral economies: the resource curse thesis », Londres et New York: Routledge Cluster Sécurité alimentaire (2010), « Annual Needs and Livelihood Assessment’, World Food Programme », Programme alimentaire mondial, http://www.wfp.org/countries/South-Sudan/Overview (dernière consultation en août 2011). Ce pourcentage est en baisse de 2009, lorsque les estimations indiquaient que 53 % de la population allait se retrouver en situation modérée ou grave d'insécurité alimentaire (21 % seraient gravement touchés). L'ANLA de novembre 2011 devrait annoncer une détérioration de la situation à partir de 2010. Bien que le contrat de bail soit signé par NTD, plusieurs autres entreprises d'investissement basées au Texas sont affiliées à NTD et liées par cet accord. Ceci comprend une affiliation entre NTD et Kinyeti Development LLC, une société basée à Austin dont le directeur est Howard Eugene Douglas, ancien ambassadeur des États-Unis et coordonnateur des affaires des réfugiés (1981-1985) pendant l'administration Reagan. (http://www.kinyeti.com/index.php?option=com_content&view=article&id=61&Itemid=79). Un récent rapport publié par l'Institut Oakland fournit des informations complémentaires sur le site web d'entreprises d'investissement interconnectées, basées en particulier au Texas et à Singapour, et qui sont affiliées à NTD. Voir le site web de Kineyti (ci-dessus) et voir: Understanding Land Investment Deals in Africa: Nile Trading and Development Inc., Sud-Soudan, Note d'information concernant la transaction foncière, juin 2011 sur http://media.oaklandinstitute.org/sites/oaklandinstitute.org/files/OI_Nile_Brief_0.pdf (dernière consultation en août 2011) Selon l'administrateur de la communauté: «Nous ne savons pas qui se trouve derrière cette « coopérative », comment elle s'est formée- il semble que quelques personnes externes à cette communauté l'ont créée et celles-ci ont conclu la transaction sur cette base... c'était la «coopérative », et non pas la communauté, qui a conclu ces accords. (Interrogé au bureau de l'administrateur de la communauté, Mukaya Payam, le 28 juillet 2011) Le chef suprême semble être à la fois un auteur et une victime; en qualité de cosignataire, il a signé en tant que représentant de la communauté Mukaya. Cependant, le chef allègue qu'il a été dupé par les membres de sa propre famille, et qu'il n'a signé le bail parce qu'il pensait que le délai était inférieur, et la surface plus réduite, et il prétend que si les deux membres de la Coopérative n'étaient pas des membres de la famille, il aurait vérifié les documents de manière plus approfondie. (Interrogé au domicile du chef suprême, Mukaya Payam, le 28 juillet 2011) « Le Chef Scoppas Lodou Torugo, James Yosia Ramadalla et Sumuel Taban Youziele. Ces trois citoyens, originaires de notre communauté, se sont réunis avec cette société sans nous consulter et ont conclu cet accord à notre insu. Et nous, les citoyens de Mukaya condamnons et rejetons à l'unanimité leur accord, nous le considérons nul et non avenu et le jugeons illégal. » - Le Président Dickson - un sous-chef de la tribu Payam, interrogé à l'Hôtel Yei le 27 juillet 2011, qui dirigeait le leader du conseil de la communauté de Juba pour présenter des preuves à l’État d’Equatoria central et au gouvernement du Sud-Soudan - cette réunion a eu lieu le lundi 1er août 2011. Selon le président de la Diaspora basée à Juba, M. Bullen Soro, les conclusions de la réunion entre la communauté Mukaya et le Gouverneur étaient que le Gouverneur leur a verbalement apporté son soutien, « Si la communauté a rejeté cet accord, on ne peut pas l'imposer au peuple ». (Entretien à son bureau de Juba le 29 juillet 2011) Les estimations locales les situent entre 89 360 et 210 000 - ces chiffres varient, car le nombre de rapatriés augmente chaque année Lomerry et Banak (2010), op. cit. p. 22 Entretien individuel enregistré par Oxfam en juillet 2011. NFC conteste ce témoignage. NFC a dit à Oxfam que « Aucune personne pouvant prouver sa résidence sur la terre avant 1992 n’a été chassée de Namwasa (la plantation de Mubende). Après le premier processus d’évacuation, les 31 familles pouvant prouver leur résidence avant 1992 ont été autorisées à se réinstaller dans la réserve jusqu’à ce qu’elles reçoivent une compensation du Gouvernement. Elles résident aujourd’hui à Namwasa. 40 41 42 43 44 45 46 47 48 49 50 La plainte enregistrée par les expulsés de Mubende est portée au nom de 1 489 familles, qui, sur la base d’une moyenne de 5 personnes par famille (Recensement de l’Ouganda en 2006), équivaut à environ 7 400 personnes. Concernant Kiboga, une lettre du bureau du premier ministre au Ministre en charge de l’eau des terres et de l’environnement, datée de novembre 2004, fait référence à 20 000 personnes menacées d’expulsion dans la région de Kiboga, qui « sont restées à cet endroit depuis le début des années 70 ». Les entretiens d’Oxfam avec les avocats pour les communautés et avec les communautés elles-mêmes suggèrent que ces chiffres pourraient être bien plus élevés. NFC base son décompte d’expulsés à Mubende sur un processus du gouvernement dans lequel 2540 familles ont soumis des demandes d’indemnisations (demande formulée pour une famille moyenne de 5 personnes, soient 2 700 individus). À Kiboga, elle déclare que le recensement a identifié 15 191 personnes affectées (même si l’entreprise indique que ceci pourrait être une surestimation des chiffres). Lors d’un appel à Oxfam le 14 septembre, NFC affirmait que selon ses estimations, le chiffre était de l’ordre de 17 800 (chiffre soumis à des variations compte tenu de ses doutes concernant la précision du recensement de Kiboga). NFC déclare que les évacuations de Kiboga ont débuté en novembre 2008 (commentaire de NFC envoyé à Oxfam, 15 septembre 2011). Basé sur des réunions entre Oxfam et le Directeur exécutif en fonction et le Directeur adjoint de la NFA, ainsi que le Responsable RDC et des ressources naturelles pour la région de Mubende ; une lettre de la NFA aux avocats des demandeurs de Kiboga datée du 1er décembre 2009 confirme cette position ; une évaluation de contrôle de la plantation de NFC à Mubende, préparée par le programme Qualifor de SGS pour FSC, fait remarquer ce qui suit : « Le gouvernement, en tant que propriétaire des terres, a clairement indiqué que les occupations sont illégales en vertu de la constitution et des lois de l’Ouganda » : l’article 32 de la Loi de plantation d’arbres et de la forêt nationale ougandaise de 2003 interdit (sauf conformément aux termes du 51 52 51 programme de gestion forestière ou d’un permis) le nettoyage de terres forestières pour l’édification d’immeubles, de cultures ou de pâturages (entre autres). 53 54 Voir le site de NFC, http://www.newforests.net, (dernière consultation, août 2011) Les expulsions de Mubende sont décrites comme « volontaires et pacifiques » dans une communication de NFC au conseil d’administration du MDP (2011), ‘Project Design Document Form for Afforestation and Reforestation Project Activities (CDM-AR-PDD) Version 4’, Namwasa Central Forest Reserve Reforestation Initiative, http://cdm.unfccc.int/UserManagement/FileStorage/EK9VT8HIJ4AQ5NG03YCRDSFWOLZ7UP (dernière consultation en août 2011); NFC affirme aussi que le processus de consultation à Mubende a été extrêmement contrôlé par la SFI et la FSC (Rapport de développement durable de NFC pour l’exercice 2010). Quant à Kiboga, NFC affirme que les « occupants illégaux coopèrent et sont évacués volontairement de la réserve » (Rapport de développement durable pour l’exercice 2010 : juillet 2009-juin 2010). 55 56 Email envoyé par NFC à Oxfam, 5 septembre 2011.. Rapport de développement durable de NFC, exercice 2010, juillet 2009-juin 2010, p.14; et une déclaration sous serment en réponse à la demande des plaignants de mesures injonctives formulée par le Représentant du développement communautaire de NFC fait référence aux demandeurs comme des « occupants illégaux et des intrus sur les terres faisant l’objet du procès et qui font partie de la Réserve forestière centrale ».’ Réponse écrite de NFC à Oxfam, 15 septembre 2011. NFC affirme que les « 31 familles qui ont pu démontrer leur résidence avant 1992 ont été autorisées à se réinstaller sur la réserve jusqu’à ce qu’elles obtiennent une indemnisation du gouvernement. Elles résident aujourd’hui à Namwasa ». Dans un entretien téléphonique avec Oxfam le 14 septembre 2001, NFC a expliqué que les 540 familles avaient soumis des demandes pour démontrer leur résidence à Mubende, mais seulement 31 familles l’ont fait auprès du gouvernement. NFC a aussi déclaré que personne à Kiboga n’a démontré de droits sur les terres. Oxfam considère que les populations de communautés rurales éloignées ont très rarement un titre légal clairement documenté, en particulier dans des pays comme l’Ouganda revenant de décennies de conflits civils où il existe des déplacements de populations internes massifs, il peut donc y avoir des difficultés évidentes pour que les personnes expulsées démontrent la durée de leur occupation des terres. La plainte de Mubende est présentée au nom de 1 489 familles (environ 7 400 individus) et la plainte de Kiboga est portée au nom de 332 familles (environ 1 500 individus). Oxfam dispose de copies de plaintes enregistrées par les demandeurs de Kiboga et a interrogé les avocats représentant les expulsés de Kiboga. Ces arguments sont aussi apparus dans un groupe de discussion et lors d’entretiens individuels avec des personnes expulsées menés par Oxfam et ses organisations partenaires en juillet 2011. Concernant la reconnaissance par le gouvernement des structures administratives, Oxfam dispose de copies de correspondances entre les conseils de village (LC1) et le gouvernement central. Oxfam dispose de copies des plaintes enregistrées par les demandeurs de Mubende ainsi que des documents qui démontrent l’allocation de terres aux anciens combattants et a interrogé les avocats représentant les expulsés de Mubende. Ces arguments trouvent aussi leur écho dans les groupes de discussion et les entretiens individuels menés par Oxfam et ses organisations partenaires en juillet 2011 Oxfam a reçu le conseil suivant de la part des avocats ougandais : il est important de concéder une ordonnance car il est important de résoudre le problème en termes de danger imminent et, car une demande d’injonction a été enregistrée et est en cours d’attente d’une audience. Une demande d’injonction considère trois tests : s’il existe une question grave à traiter : un danger imminent, et l’impossibilité de réparer les dommages dans l’hypothèse où un recours en injonction n’est pas accordé. Le tribunal est guidé dans ses délibérations par un test de « Prépondérance des inconvénients » Les exigences pour le candidat sont assez élevées, mais partent des prémices qu’il existe le besoin de maintenir un statu quo jusqu’à ce que la Cour puisse mener les audiences et trancher sur le demande principale. Ces deux procédures, s’agissant de recours discrétionnaires, seront accordées ou refusées en fonction des circonstances particulières et de la force des arguments présentés. Oxfam dispose d’une copie de l’ordonnance de référé accordée par la Haute Cour centrale de Nakawa le 19 juin 2009 contre NFC, « qui limite les facultés du répondant, de ses employés, agents et mandataires et/ou de ceux qui agissent par son intermédiaire ou en son nom pour expulser les demandeurs et leurs familles, en détruisant leurs cultures, écoles, hôpitaux, infrastructure sociale et bétail ». L’ordonnance de Kiboga est restée en vigueur jusqu’au 2 octobre 2009. À Mubende, Oxfam observe que le modèle était similaire : les avocats représentant la communauté ont expliqué à Oxfam qu’une ordonnance de référé avait été accordée contre NFC, et étendue au 18 mars 2010, mais avait été ignorée, comme l’a rapporté l’Observer ougandais le 11 janvier 2010 : http://www.observer.ug/index.php?option=com_content&view=article&id=6736:museveniokays-eviction-of-1500-mubende-homes&catid=78:topstories&Itemid=59 (dernière consultation en août 2011). L’ordonnance de Mubende a été accordée le 24 août 2009 et est restée en vigueur jusqu’au 18 mars 2010 : les communautés ont dit à Oxfam lors des échanges dans le cadre des groupe de discussions et des entretiens individuels qu’une grande part des expulsions a eu lieu en février 2010. À Kiboga, l’ordonnance a été accordée le 19 juin 2008 et est restée en vigueur jusqu’au 2 octobre 2009 : les communautés ont raconté à Oxfam lors des groupe de discussion et des entretiens individuels que les expulsions avaient eu lieu pendant la période de 2008 à juillet 2010 : les plaintes dans l’affaire de Kiboga font référence à des tentatives d’expulsion en 2008 et la correspondance en annexe entre l’Inspecteur général de la Police et la Commandant régional de la Police de la région centrale suggère que les ordonnances précédentes de la Cour étaient également en vigueur pour juin 2008 Basé sur des témoignages cohérents issus de 12 groupes de discussion auxquels ont participé 615 personnes en juillet 2011 et sept groupes de discussion auxquels ont participé 118 expulsés en mars 2011 (dans les deux régions). Cette thèse est également appuyée par les entretiens individuels menés par Oxfam en mars et juillet 2011 Basé sur les témoignages cohérents issus de 12 groupes de discussion auxquels ont participé 615 personnes en juillet 2011 et sept groupes de discussion auxquels ont participé 118 expulsés en mars 2011 (dans les deux régions). Cette thèse est également appuyée par les entretiens individuels menés par Oxfam en mars 57 58 59 60 61 62 63 64 65 52 et juillet 2011. Les plaintes enregistrées par les demandeurs appuient ces allégations ; la plainte de Kiboga fait référence à une lettre du président de la région de Kiboga au premier ministre datée du 1er juillet 2008 qui qualifie les expulsions de « brutales et forcées ». Oxfam entend que NFC a nié ces allégations dans le cadre d’une défense présentée à la haute cour. Voir également les rapports à l’adresse : http://www.observer.ug/index.php?option=com_content&view=article&id=6736:museveni-okays-eviction-of1500-mubende-homes&catid=78:topstories&Itemid=59, et http://www.fscwatch.org/archives/2009/09/16/Uganda__Villagers_pe (dernière consultation en août 2011). 66 Plainte enregistrée par 1 489 demandeurs dans l’affaire de procédure civile N°. 164 de 2009 (Haute Cour de l’Ouganda Holden à Nakawa) Lettre de NFC à Oxfam, datée du 9 septembre 2011 Résumé public du rapport de certification de gestion forestière de SGS pour la FSC : http://www.forestry.sgs.com/documents/sgs-2405-ug-new-forests-sa2010-11-ad36a-sc-psummary-en-10.pdf Suite à des conversations avec l’entreprise, Oxfam comprend que NFC affirme que de tels incidents n’ont pas été portés à l’attention de NFC et qui leur semble être fondés Conversation téléphonique avec Oxfam le 14 septembre 2011 Réponse écrite de NFC à Oxfam, 15 septembre 2011; email de NFC à Oxfam, 5 septembre 2011 Réponse écrite de NFC à Oxfam, 15 septembre 2011. En outre, Oxfam comprend que NFC conteste le caractère applicable de l’ordonnance correspondant aux expulsions de Mubende du fait que les plaignants ont mal nommé l’entreprise dans leur demande. L’ordonnance a été accordée pour contraindre Namwasa New Forest Company Uganda Ltd. NFC a adopté la perspective légale selon laquelle, par conséquent « l’ordonnance n’était pas largement applicable contre le défendeur ». Basé sur le fait qu’aucune des 615 personnes expulsées ayant participé aux 12 groupes de discussion en juillet 2011 et aucune des 118 personnes expulsées ayant participé aux 7 groupes de discussion en mars 2011 n’ont reçu d’indemnisation ou entendu parler de personnes expulsées qui en auraient bénéficié. Oxfam reconnaît que si les communautés ne disposaient pas des droits légaux sur les terres qu’elles occupaient, il se peut qu’elles n’aient pas droit de recevoir une indemnisation. Le caractère légal des séjours des communautés sur les terres n’a cependant pas été tranché par la Cours. De plus, les critères de rendement de la SFI disposent qu’une consultation informée et une indemnisation sont nécessaires, même en cas d’expropriations légales. Certaines personnes expulsées à Mubende déclarent que début 2010 le Commissaire de région titulaire (RDC) leur a demandé d’ouvrir des comptes bancaires pour recevoir l’indemnisation ; Oxfam a consulté des documents qui démontrent que les comptes ont été ouverts, mais en juillet 2011, personne ne disait avoir reçu d’argent. NFC déclare que le RDC a formulé des propositions d’indemnisation en appelant les ministres à verser les paiements, mais ses efforts ont été vains. Dans un entretien enregistré, un leader de la communauté de Kiboga raconte à Oxfam que le président du conseil de région a demandé à NFC d’identifier les terres pour la réinstallation et que NFC a proposé les conditions de l’offre. Oxfam dispose d’une copie du procès-verbal d’une réunion entre NFC et les représentants officiels (réunion à laquelle la communauté n’était pas représentée), qui semble appuyer ce témoignage : le procès-verbal enregistre « une proposition de démarquer une zone d’au moins un mile carrée et au plus deux miles carrés – la taille devant être déterminée après les résultats du recensement menés grâce aux fonds de 7 m d’Ugshs fournis par NFC – qui serait conçue comme une zone qui pourrait être utilisée par les occupants historiques lors de la demande d’une autorisation d’occupation temporaire de l’Autorité nationale forestière (NFA) pour une durée de 5 ans, période pendant laquelle des solutions à long terme à l’occupation devraient être trouvées ». Voir aussi le Rapport de développement durable de NFC pour l’exercice 2010, juin 2009-juillet 2010, p. 13: « la voie la plus simple et la moins chère aurait consisté à payer une indemnisation, mais le Gouvernement, notre propriétaire, a considéré qu’il s’agissait d’un dangereux précédent pouvant causer des conflits communautaires pour les centaines d’autres transactions relatives aux terres du gouvernement. » Lettre de NFC à Oxfam datée du 9 septembre 2011, qui indique qu’il est illégal pour un investisseur privé de louer des terres CFR pour offrir ou promettre une indemnisation Conversation téléphonique avec Oxfam, 14 septembre 2011 Rapport de retour de mission présenté à la SFI par R. Novozhilov, mars 2010 « Sawit » signifie palmier à huile M. Colchester, et al (2006) Promised Land: Palm Oil and Land Acquisition in Indonesia – Implications for Local Communities and Indigenous Peoples, Forest Peoples Programme and Sawit Watch. Extrait d'un courrier électronique de Sime Darby à Oxfam, 22 août 2011 Extrait d'un courrier électronique de Sime Darby à Oxfam, 22 août 2011 Sawit Watch, entretien mené en août 2011. Lors de la 5ème rencontre RSPO, une série de réunions a eu lieu entre Azhar Dato, le président des plantations SynergyDrive et des membres du personnel, et des représentants de SPKS, Sawit Watch et de l'ONG néerlandaise Both ENDS. Le procès-verbal de ces réunions (rédigé par Sawit Watch et Both Ends) montre que les discussions entourant les projets d'expansion de PT MAS III conduisaient à des tensions sociales. Les dirigeants de villages et de communautés ont exprimé différentes opinions sur l'éventuel arrêt des projets. Depuis 2007, les projets d'expansion sont suspendus, ininterrompus et les tensions sociales perdurent. Le procès-verbal de la réunion indiquait ce qui suit : «À compter du 21 novembre 2007, l'expansion des plantations de PT MAS III sera immédiatement suspendue. Le statut des projets d'expansion sera décidé lors de la 15ème réunion en décembre. L'expansion ne sera autorisée à reprendre que si la communauté le permet. » Sime Darby, Core Businesses, http://www.simedarby.com/Core_Businesses.aspx (dernière consultation en juillet 2011). 67 68 69 70 71 72 73 74 75 76 77 78 79 80 81 82 83 84 85 86 53 87 88 89 Extrait d'un courrier électronique de Sime Darby à Oxfam, 22 août 2011 Conclusion des recherches d'Oxfam, et noté dans Colchester et al (2006) op. cit., p.98 Fedepalma (n.d.) « Colombia - The Land of the Oil Palm Tree’, Fedepalma, http://www.fedepalma.org/oil_col.htm (dernière consultation en juillet 2011); Mica Rosenberg (2003) « Colombia shifts from drugs to food in farm expansion », Reuters, 23 mai http://af.reuters.com/article/energyOilNews/idAFN194019120110523 (dernière consultation en juillet 2011). Giorgio Trucchi (2010) « De nuevo corre la sangre en el Aguán » Alba Sud, 23 novembre http://www.albasud.org/noticia/135/de-nuevo-corre-la-sangre-en-el-bajo- Aguan (dernière consultation en juillet 2011). CESPAD (2011) « La Reconcentración de la Tierra y la lucha Campesina en el Bajo Agua. Caso del MUCA Honduras’, Tegucigalpa: Centro de Estudios Para la Democracia (CESPAD). Movimiento Unificado de Campesinos del Aguán BBC News (21 août 2011), « Honduran farm workers' leader killed amid land tensions. » http://www.bbc.co.uk/news/world-latin-america-14609778 (dernière consultation en août 2011), Association des organisations de développement européennes liées au Conseil œcuménique des Églises en Europe (APRODEV), Initiative de Copenhague pour l'Amérique centrale (CIFCA ), FIAN, Fédération internationale des droits de l'homme (FIDH), Regional latinoamericana de la Unión Internacional de los Trabajadores de la Alimentación, Agrícolas, Hoteles, Restaurantes, Tabaco y Afines (Rel-UITA), Via Campesina (2011) « Honduras: Violaciones de Derechos Humanos en el Bajo Aguán. Informe Preliminar de la Misión de Verificación Internacional Realizada del 25 febrero a 4 marzo de 2011 », 25 mars, http://www.fian.org/recursos/publicaciones/documentos/honduras-violaciones-de-derechos-humanos-en-elbajo-aguan/pdf (dernière consultation en août 2011) Coordinadora Nacional de Organizaciones Campesinas (CNOC) (2005) « Propuesta de Reforma Agraria Integral », Guatemala City : CNOC Le résumé de l'évaluation environnementale et sociale de la SFI estime que « l'acquisition des terres est le fruit d'une entente de gré à gré entre le vendeur et l'acheteur, et qu'il n'existe pas de déplacement involontaire de quiconque » http://www.ifc.org/ifcext/spiwebsite1.nsf/ProjectDisplay/ESRS27250 (dernière consultation en août 2011) Site internet d’EDF Trading, « EDF Trading terminates its involvement with the Aguan CDM project » http://www.edftrading.com/pressReleases.aspx?m=19&amid=2021 (dernière consultation en août 2011). FIAN (2011) « German development bank withdraws Dinant finance in response to human rights violations in Bajo Aguán, Honduras », Heidelberg: FIAN, http://www.fian.org/news/press-releases/german-developmentbank-withdraws-dinant-finance-in-response-to-human-rights-violations-in-bajo-aguan-honduras (dernière consultation en juillet 2011) ; El Heraldo, 13 avril 2011. D'autres groupes de paysans connaissant des problèmes de conflits fonciers dans la vallée d’Aguán comprennent le Mouvement de revendication large de l'Aguán (Movimiento Amplio Reivindicador del Aguán, MARCA) et le Mouvement paysan de l'Aguán (Movimiento Campesino del Aguán, MCA). Fernando Quiñones (2011), « Grupo Pellas compra ingenio y creará 2 mil empleos », siglo21.com.gt, 21 juin 2011, http://www.s21.com.gt/pulso-economico/2011/06/21/ grupo-Pellas-compra-ingenio-Creara-2-milempleos (dernière consultation en août 2011). Statistiques fournies par la FAO, (FAOSTAT, 2010), citées par Alberto Alonso-Fradejas dans Coordination nationale des ONG et des coopératives (IDEAR CONGCOOP) (2010) « Revista Territorios V, Monocultivos: la cara del nuevo modelo agraria extractivista en América Latina », Guatemala City : IDEAR CONGCOOP. Assemblée générale du Conseil des droits de l'homme des Nations Unies (2010) « Rapport du Rapporteur spécial sur le droit à l'alimentation, Olivier de Schutter, Addendum : Mission au Guatemala », A/HRC/13/33/Add.4, New York: Nations Unies, http://www.srfood.org/images/stories/pdf/officialreports/20100305_a-hrc-13-33-add4_country-missionguatemala_en.pdf (dernière consultation en juillet 2011). Ibid. Alberto Alonso-Fradejas (2007) « Caña de Azucar y palma africana: combustibles para un nuevo ciclo de acumulación y dominio in Guatemala », Guatemala : IDEAR-CONGCOOP. « Subastarán fincas y activos del ingenio Chabil Utzaj » (2010), El Periódico, 6 août, http://www.elperiodico.com.gt/es/20100806/economia/168283 (dernière consultation en août 2011). GIDHS (2011), Equipo de Trabajo de Relevamiento de Derechos Humanos en Guatemala, « Informe Polochic Marlin ». Barcelone : Grupo de Investigación en Derechos Humanos y Sostenibilidad de la Cátedra UNESCO en Sostenibilidad de la Universidad Politécnica de Cataluña, août 2011. La Sierra de las Minas est une réserve de biosphère de l'UNESCO. Lettre de NFC à Oxfam datée du 9 septembre 2011 90 91 92 93 94 95 96 97 98 99 100 101 102 103 104 105 106 107 Basé sur les témoignages de 12 groupes de discussion auxquels ont participé 615 personnes en juillet 2011 et 7 groupes de discussion auxquels ont participé 118 expulsés en mars 2011 (dans les deux districts). Cette thèse est également appuyée par les entretiens individuels menés par Oxfam en mars et juillet 2011. De plus, les plaintes et les déclarations sous serment qui appuient l’affaire portée devant la cour de Mubende font référence à la perte de moyens de subsistance occasionnée par les expulsions et allèguent que les « écoles et les centres de santé [ont été] fermés par le défendeur et/ou ses agents et employés » et que « nos enfants ne vont plus à l’école par manque d’argent » Basé sur les témoignages de 12 groupes de discussions auxquels ont participé 615 personnes en juillet 2011 et 7 groupes de discussion auxquels ont participé 118 expulsés en mars 2011 (dans les deux régions). Cette thèse est également appuyée par les entretiens individuels menés par Oxfam en mars et juillet 2011. De plus, les plaintes et les déclarations sous serment qui appuient l’affaire portée devant la cour de Mubende 107 54 font référence à la perte de moyens de subsistance occasionnée par les expulsions et allèguent que les « écoles et les centres de santé [ont été] fermés par le défendeur et/ou ses agents et employés » et que « nos enfants ne vont plus à l’école par manque d’argent » 108 109 110 Conversation téléphonique avec Oxfam, 14 septembre 2011 Réponse écrite de NFC à Oxfam, 15 septembre 2011 Basé sur les témoignages de 12 groupes de discussions auxquels ont participé 615 personnes en juillet 2011 et 7 groupes de discussion auxquels ont participé 118 expulsés en mars 2011 (dans les deux régions). Cette thèse est également appuyée par les entretiens individuels menés par Oxfam en mars et juillet 2011. De plus, les plaintes et les déclarations sous serment qui appuient l’affaire portée devant la cour de Mubende font référence à la perte de moyens de subsistance occasionnée par les expulsions et allèguent que les « écoles et les centres de santé [ont été] fermés par le défendeur et/ou ses agents et employés » et que « nos enfants ne vont plus à l’école par manque d’argent » Conseil des droits de l'homme de l'Assemblée générale des Nations Unies (2009) « Rapport du Rapporteur spécial sur le droit à l’alimentation, Olivier De Schutter – Addendum : - Acquisitions et locations de terres à grande échelle : ensemble de principes minimaux et de mesures pour relever le défi au regard des droits de l’homme », A/HRC/13/33/Add.2, New York : Conseil des droits de l'homme des Nations Unies. Entre autres accords, il se réfère notamment : au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, au Pacte international relatif aux droits civils et politiques; à l'Observation générale sur le droit à un logement adéquat, à la Déclaration sur les droits des peuples autochtones, à la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale, et à divers instruments de l'OIT sur les droits des travailleurs et sur les conditions de travail. Christina Hill, Serena Lillywhite et Michael Simon (2010) ‘Guide to Free Prior and Informed Consent’, Carlton, Victoria: Oxfam Australie, http://www.oxfam.org.au/resources/filestore/originals/OAUsGuideToFreePriorInformedConsent-0610.pdf (dernière consultation en juillet 2011). Kachika (2010) op. cit. Rapport de développement durable de NFC pour l’exercice 2010 : juillet 2009-juin 2010, p 14 et 60 Basé sur les témoignages de 12 groupes de discussions auxquels ont participé 615 personnes en juillet 2011 et 7 groupes de discussion auxquels ont participé 118 expulsés en mars 2011 (dans les deux régions). Cette thèse est également appuyée par les entretiens individuels menés par Oxfam en mars et juillet 2011. Lettre de NFC à Oxfam, 9 septembre 2011. Au cours d’une conversation téléphonique avec Oxfam le 14 septembre 2011, NFC a expliqué que l’enquête a identifié 15 191 personnes mais qu’aucun rapport final n’a été livré et NFC s’inquiète quant à son exactitude. Basé sur des témoignages rassemblés auprès des groupes de discussion en juillet 2011 et d’entretiens avec des témoins réalisés par Oxfam en juillet 2011 USAID (2010) « Land Tenure Issue in South Sudan: Key Findings and Recommendations for Sothern Sudan Land Policy » http://blog.usaid.gov/2011/08/helping-south-sudan-establish-secure-land-tenure/ Loi foncière Ch. IX, § 63 (3)); Loi de gouvernement locale Ch. IX, § 89; Loi foncière Ch. X, § 67; Loi foncière Ch. XI, § 70 (1) Le Soudan a promulgué la Loi foncière et la Loi de gouvernement local en 2009, après la signature du contrat avec NTD. La nouvelle loi exige une consultation de la communauté avant la location de terres à un investisseur; une consultation avec les groupes de bergers ayant des droits d'accès secondaires, et des évaluations d'impacts environnemental et social. Aucun des cas examinés dans le présent document d'information n'a été mentionné dans le rapport de l'IIED. L. Cotula (2011) « Land Deals in Africa: What is in the contracts? » Londres: IIED, http://pubs.iied.org/pdfs/12568IIED.pdf (dernière consultation en juillet 2011) Ibid. L'acronyme IIRSA correspond en espagnol à: Iniciativa para la Integración de la Infraestructura Regional Sudamericana « El síndrome del perro del hortelano », quotidien El Comercio (Péru), 28 octobre 2007 http://elcomercio.pe/edicionimpresa/html/2007-10-28/el_sindrome_del_perro_del_hort.html (dernière consultation, août 2011). La métaphore du “chien du jardinier” vient d’une fable grecque qui raconte l’histoire d’un chien qui gardait des choux et qui même s’il n’en mangeait pas, empêchait aussi le cheval d’en manger. de Schutter, O. (2010) « Report of the Special Rapporteur on the Right to Food, Mission to Guatemala », HCDH de l'ONU, P.8, http://www.srfood.org/images/stories/pdf/officialreports/20100305_a-hrc-13-33add4_country-mission-guatemala_fr.pdf (dernière consultation en juillet 2011). Il n'y a aucune piste indiquant que les « divers cas » mentionnés dans le rapport du Rapporteur spécial comprennent des cas impliquant la famille Widmann ou Chawil Utz'aj. Voir note 59 Basé sur les témoignages de 12 groupes de discussion auxquels ont participé 615 personnes en juillet 2011 et 7 groupes de discussion auxquels ont participé 118 expulsés en mars 2011 (dans les deux régions). Cette thèse est également appuyée par les entretiens individuels menés par Oxfam en mars et juillet 2011. Oxfam a aussi présenté des photographies de cultures détruites et de bétail blessé à Kiboga, ces évènements étant intervenus durant les expulsions, selon les personnes interrogées. Bien que les ordonnances judiciaires s'adressaient à NFC (la NFA et les autres parties ont rejoint les défendeurs de la revendication de Kiboga en juillet 2009), les dirigeants communautaires ont indiqué à Oxfam qu'ils ont rappelé l'existence des ordonnances aux autorités locales, y compris à la police. L’ordonnance de Mubende a été étendue au 18 mars 2010, les communautés ont affirmé à Oxfam dans le cadre des échanges des groupes de discussion et dans le cadre d’entretiens individuels que l’essentiel des expulsions avait eu lieu en février 2010 et les déclarations sous serment appuyant les plaintes légales se 111 112 113 114 115 116 117 118 119 120 121 122 123 124 125 126 127 128 129 55 rapportent aux expulsions de juillet 2009. À Kiboga, l’ordonnance a été en vigueur jusqu’au 2 octobre 2009, les communautés précisant à Oxfam lors des groupes de discussion et des entretiens individuels que les expulsions ont eu lieu au cours de la période 2008 à juillet 2010. 130 L. German, G. Schoneveld, and E. Mwangi (2011) ‘Processes of Large-Scale Land Acquisition by Investors: Case Studies from Sub-Saharan Africa’, document présenté lors de la Conférence internationale sur les accaparements de terres mondiaux, Université du Sussex, 6–8 avril 2011. Entretiens d'Oxfam avec les membres de la communauté. Il s'agit d'une pratique commune dans le cadre d'acquisitions de terre en Indonésie (Sirait, Martua. T (2009). Indigenous Peoples and Oil Palm Plantation Expansion in West Kalimantan, Indonesia. Université d'Amsterdam et Cordaid.). Cotula (2011), op. cit. Fisher, R. et W. L. Ury (1981) « Getting to YES: Negotiating Agreement Without Giving In’, Londres : Penguin. de Schutter (2009), op. cit. Kalin, W. et J. Kunzli (2009) The Law of International Human Rights Protection, New York: Oxford University Press. Association des chefs de villages indigènes du Suriname, Association des administrations de Saramaka, et le programme Forest Peoples (2009) Rapport sur la situation des peuples indigènes et tribaux au Suriname et commentaires sur les 11ème et 12ème rapports périodiques sur le Suriname http://archive.forestpeoples.org/documents/s_c_america/suriname_cerd_ngo_shadow_rep_feb09_eng.pdf (dernière consultation en août 2011); Lehr, A.K. et G.A. Smith (2010) « Implementing a Corporate Free, Prior, and Informed Consent Policy: Benefits and Challenges’, Boston et Washington: Foley Hoag, 131 132 133 134 135 136 137 http://www.foleyhoag.com/NewsCenter/Publications/eBooks/Implementing_Informed_Consent_Polic y.aspx?ref=1 (dernière consultation en août 2011) 138 Affaire 276/03 Centre for Minority Rights Development (Kenya) et Minority Rights Group (au nom du Endorois Welfare Council)/Kenya (2009) Analyste de la jurisprudence africaine relative aux droits de l'homme, http://caselaw.ihrda.org/doc/276.03/ (dernière consultation en août 2011) Ruggie, J. (2008) « Protect, Respect, and Remedy: A Framework for Business and Human Rights. Rapport du Représentant spécial du Secrétaire général pour les droits de l'homme et pour les sociétés transnationales et autres entreprises », 7 avril 2008, HHCD de l'ONU, par. 3, http://www.businesshumanrights.org/Documents/RuggieHRC2008 (dernière consultation en août 2011) Ibid. Ibid. Ruggie, J. (2010) « Rapport du Représentant spécial du Secrétaire général chargé de la question des droits de l'homme et des sociétés transnationales et autres entreprises. Business and human rights: further steps toward the operationalization of the “protect, respect and remedy” framework’, A/HRC/14/27, avril 2010, HautCommissariat des Nations Unies aux droits de l'homme (HCDH) , http://198.170.85.29/Ruggie-report2010.pdf (dernière consultation en août 2011) La Loi Dodd-Frank exige une transparence sans précédent pour les investissements dans les industries extractives. Ainsi, toute entreprise américaine cotée en Bourse doit divulguer les paiements de revenus effectués dans chaque pays du monde. Ensuite, les entreprises qui s'approvisionnent en coltane et d'autres minéraux précieux du Congo ou des pays limitrophes doivent divulguer leurs activités. Tels que Land Matrix Partnership; le site de GRAIN: http://www.farmlandgrab.org (dernière consultation en août 2011); le site du CIT: http://www.commercialpressuresonland.org/ (dernière consultation en août 2011) http://www.oecd.org/document/28/0,3746,en_2649_34889_2397532_1_1_1_1,00.html (dernière consultation le 19 septembre 2011) SFI (2011) ‘Press Release: IFC Updates Environmental and Social Standards, Strengthening Commitment to Sustainability and Transparency’, Washington, D.C.: SFI, 12 mai Pour de plus amples informations concernant les Principes de l'Équateur, voir http://www.equatorprinciples.com/ (dernière consultation en août 2011) La SFI déclare: « Il existe un consensus émergent parmi les institutions de développement qui va dans le sens que l'adoption du terme de [consentement libre, préalable et éclairé] est nécessaire. De plus en plus, d'autres IFI (Banque européenne pour la reconstruction et le développement, Banque interaméricaine de développement, Banque asiatique de développement, Fonds international de développement agricole), les associations de l'industrie (par exemple, l'association de l'hydroélectricité), et des tables rondes ont adopté ou envisagent d'adopter [ces principes].” (SFI (2010) “Progress Report on IFC’s Policy and Performance Standards on Social and Environmental Sustainability and Access to Information Policy”, Washington, D.C: Banque mondiale, 1er décembre). Pour de plus amples informations sur le conseil-médiateur de la SFI, voir http://www.cao-ombudsman.org/ (dernière consultation en août 2011) Depuis 1999, la CAO a traité 76 plaintes (sur 127 plaintes déposées) relatives à 48 différents projets de la SFI/MIGA, dans 28 pays du monde entier. Voir http://www.caoombudsman.org/documents/CAO_10Year_AR_web.pdf (dernière consultation en août 2011) Wilmar (2009) ‘Sustainability Report’, p. 56, Singapour : Wilmar International Ltd, http://www.wilmarinternational.com/sustainability/resources/Wilmar%20SR%202009_single.pdf, p. 56 (dernière consultation en août 2011) La définition qu’Oxfam donne à l’accaparement de terres est précisée en page 7 du présent rapport SFI, Politique de développement durable social et environnemental, 1er janvier 2012 139 140 141 142 143 144 145 146 147 148 149 150 151 152 153 56 154 155 Rapport de retour de mission, R. Novozhilov, SFI, mars 2010 et lettre de la SFI à Oxfam, 13 septembre 2011 Déclaration de la BEI sur les Normes et principes sociaux et environnementaux, 2009 et lettre de la BEI à Oxfam, 13 septembre 2011 SGS Qualifor 2010, Forest Management Certification Report, Doc No. AD36A-08. Voir : http://www.forestry.sgs.com/documents/sgs-2405-ug-new-forests-sa2010-11-ad36a-sc-psummary-en-10.pdf. SGS Qualifor 2010, Forest Management Certification Report, Doc No. AD36A-08 (voir : http://www.forestry.sgs.com/documents/sgs-2405-ug-new-forests-sa2010-11-ad36a-sc-psummary-en-10.pdf) et le rapport de développement durable de pour l’exercice 2010: juillet 2009-juin 2010. Lettre de Agri-Vie à Oxfam, 12 septembre 2011 Les initiatives multipartites peuvent aussi jouer un rôle fondamental pour promouvoir un environnement qui conduise à l'introduction de règles juridiques applicables au niveau national dans les pays touchés. Pour de plus amples informations sur les Critères et principes de la FSC voir http://www.fsc.org/1093.html (dernière consultation en août 2011). Lettre de NFC à Oxfam, 9 septembre 2011 Pour de plus amples informations sur les Critères et principes de la FSC voir http://www.fsc.org/1093.html (dernière consultation en août 2011). Dans le cadre de ces affaires, SGS a fait remarquer dans le rapport de 2009 que « un processus légal est en cours pour résoudre les plaintes. A la fois les plaintes liées aux terres ou celles liées aux cultures (étant donné que leur validité est douteuse) ne sont pas d’une importance telle ou n’implique pas d’intérêts de nature à empêcher la certification de l’entreprise ». Recharge (2011), “Call for ban on suspect carbon projects after human rights fears”. http://www.rechargenews.com/business_area/politics/article268541.ece (dernière consultation en août 2011) Rice, T. (2010) ‘Meals per gallon: The impact of industrial biofuels on people and global hunger’, Londres: Actionaid, http://www.actionaid.org.uk/doc_lib/meals_per_gallon_final.pdf (dernière consultation en août 2011); Bailey, R. (2008) ‘Another inconvenient Truth: How biofuel policies are deepening poverty and accelerating climate change’, #114 Oxfam briefing paper series, Oxford: Oxfam. http://www.oxfam.org/policy/another-inconvenient-truth (dernière consultation en août 2011) Pour de plus amples informations, voir http://cdm.unfccc.int/ (dernière consultation en août 2011) CCNUCC, Projet 3197: Aguán biogas recovery from Palm Oil Mill Effluent (POME) ponds and biogas utilisation - Exportadora del Atlántico, Aguán/Honduras, http://cdm.unfccc.int/Projects/DB/TUEVSUED1260202521.42/view (dernière consultation, septembre 2011). Voir la note 68 et le communiqué de presse de CDM Watch (2011), ‘EU action required as UN Panel keeps flawed rules of carbon offsetting scheme in place’, 18 juillet, www.cdm-watch.org/?p=2187 (dernière consultation septembre 2011) FIAN /CDM Watch (2011) ‘United Nations under Pressure to Denounce Human Rights Abuses in Carbon Offsetting Scheme’, http://www.fian.org/news/press-releases/united-nations-under-pressure-to-denouncehuman-rights-abuses-in-carbon-offsetting-scheme (dernière consultation en 2011) Recharge (2011) op. cit Recharge (2011), op. cit. et CDM Watch (2011), op. cit Conseil Exécutif du MDP(2011), op. cit. : voir la partie Normes dans les chaînes de valeur ci-dessus, pour avoir une explication aux préoccupations d’Oxfam liées à la certification de NFC par la FSC. Perez, J., M. Gistelinck, et D. Karbala (2011) ‘Sleeping Lions: International investment treaties, state-investor disputes and access to food, land and water’, Oxford: Oxfam international, http://www.oxfam.org/en/grow/policy/sleeping-lions (dernière consultation en août 2011) 156 157 158 159 160 161 162 163 164 165 166 167 168 169 170 171 172 57 © Oxfam International septembre 2011 Ce document a été rédigé par Bertram Zagema. Oxfam remercie Duncan Pruett, Kate Geary, Rohit Malpani, Kimberly Pfeifer, Radhika Sarin, Constantino Casabuenas, Dominic Jones, Claire Mortimer, Richard King, Gine Zwart, Kelly Gilbride, Sandra Seeboldt, Isabel Crabtree-Condor, Augustino Buya, Marc Wegerif, Thur de Kuijer, Giovana Vazquez, Asier Hernandez, Raquel Checa, Yolanda Palacios, et Ana Eugenia Marín pour leur collaboration dans sa réalisation. Ce document fait partie d’une série de rapports de recherche écrits pour informer et contribuer au débat public sur des problématiques relatives au développement et aux politiques humanitaires. Ce document peut être utilisé librement à des fins de campagne, d’éducation et de recherche moyennant mention complète de la source. Le détenteur des droits demande que toute utilisation lui soit notifiée à des fins d’évaluation. Pour copie dans toute autre circonstance, réutilisation dans d’autres publications, traduction ou adaptation, une permission doit être accordée et des frais peuvent être demandés. Courriel : publish@oxfam.org.uk. Pour toute information sur les questions soulevées dans ce document, veuillez nous envoyer un courrier électronique à advocacy@oxfaminternational.org Les informations contenues dans ce document étaient correctes au moment de la mise sous presse. Publié par Oxfam Grande-Bretagne pour Oxfam International sous le numéro ISBN 978-1-84814-974-8 en septembre 2011. Oxfam GB, Oxfam House, John Smith Drive, Cowley, Oxford, OX4 2JY, Royaume-Uni. Oxfam Oxfam est une confédération internationale de 15 organisations qui travaillent ensemble dans 98 pays pour trouver des solutions durables à la pauvreté et l’injustice : Oxfam Amérique (www.oxfamamerica.org), Oxfam Australie (www.oxfam.org.au), Oxfam-en-Belgique (www.oxfamsol.be), Oxfam Canada (www.oxfam.ca), Oxfam France (www.oxfamfrance.org), Oxfam Allemagne (www.oxfam.de), Oxfam Grande-Bretagne (www.oxfam.org.uk), Oxfam Hong Kong (www.oxfam.org.hk), Oxfam Inde (www.oxfamindia.org), Intermon Oxfam (www.intermonoxfam.org), Oxfam Irlande (www.oxfamireland.org), Oxfam Mexique (www.oxfammexico.org), Oxfam New Zealand (www.oxfam.org.nz), Oxfam Novib (www.oxfamnovib.nl), Oxfam-Québec (www.oxfam.qc.ca) Les organisations suivantes, actuellement membres observateurs d’Oxfam International, travaillent vers une affiliation complète : Oxfam Japon (www.oxfam.jp) Oxfam Italie (www.oxfamitalia.org) N’hésitez pas à contacter les organisations répertoriées ci-dessus, par téléphone ou par courrier, pour toute information complémentaire. Vous pouvez également vous rendre sur : www.oxfam.org/fr Courriel : advocacy@oxfaminternational.org www.oxfam.org/cultivons 58